mercredi 28 mai 2014

Élections européennes : le FN comme prévu

C'est dimanche soir à 20h00 que les résultats des élections européennes sont tombés. Et pour beaucoup la nouvelle a été catastrophique. Certains ont même parlé de véritable séisme et chacun y est allé de son petit commentaire.
 
Mais de quoi parle-t-on en réalité ? Rien de plus qu'un évènement annoncé depuis longtemps. Un évènement que beaucoup avaient anticipé et que d'autres ont préféré ignorer.
Oui le Front National a remporté les élections européennes en France.
Oui le parti de Marine Le Pen est arrivé en tête dans la plupart des circonscriptions électorales.
Et oui ce résultat était clairement prévisible même si certains, notamment au gouvernement, n'ont pas voulu le voir.
 
Il est facile aujourd'hui de se lamenter sur le score du FN et de jeter l'anathème sur ses électeurs. Mais il serait nettement plus utile et intéressant de s'interroger sur les raisons d'un tel vote. Car la carte du Français xénophobe ne peut à nouveau être abattue.  
 
Le vote Front National est aujourd'hui plus vaste et plus complexe qu'il ne l'était auparavant. Et il revêt dorénavant des réalités sociologiques, économiques et géographiques bien différentes. Dans cette élection, le FN a bénéficié d'un contexte plutôt favorable et s'est appuyé principalement sur trois facteurs : situation économique et financière du pays déplorable, rejet de l'UE et contestation du PS et de l'UMP qui déçoivent chaque jour un peu plus.
 
Cette élection européenne, aux enjeux importants mais aux conséquences indirectes sur notre pays, a donc été le moyen pour les électeurs d'envoyer un message au pouvoir en place. Plus encore que les municipales. Le FN a ainsi pu capitaliser les voix de son propre socle électoral qui s'est mobilisé mais aussi celles des personnes opposées à l'Europe sans oublier évidemment toutes les voix de ceux qui ont "nationalisé" cette élection en votant contre le PS et l'UMP.
 
Comme souvent, le bulletin FN est donc davantage un vote contre qu'un réel vote d'adhésion à une ligne politique, même s'il est vrai que cela tend progressivement à s'inverser. Autrement dit, ce résultat ne conditionne en aucun cas l'issue des prochaines élections et cette victoire aux européennes n'implique pas forcément que les résultats aux autres scrutins seront du même ordre. Rien n'est alors joué d'avance et c'est à nos dirigeants de tenir compte des votes successifs.
 
Mais laissons quelque peu de côté le FN pour s'intéresser aux autres paramètres de ce scrutin. Car au final le FN n'est qu'un élément parmi d'autres.
L'abstention est ainsi une donnée toujours importante. Et contrairement à ce que je pensais, le taux d'abstention n'est pas si catastrophique que cela. Certes 57 % n'est pas un chiffre négligeable mais au vu du contexte national et européen, de la proximité avec les municipales et de la date choisie (fête des mères), on pouvait légitimement s'attendre à une participation bien plus faible. Cela étant, il est clair que l'abstention dans notre pays est un phénomène préoccupant.
 
S'agissant des résultats en eux-mêmes, on ne peut que constater que le PS (13,98 %) et l'UMP (20,79 %) engrangent des scores relativement faibles, ce qui me semble être une juste récompense pour l'ensemble de leur œuvre. Copé a beau additionner les résultats de l'UMP et de l'UDI-Modem pour passer artificiellement en tête, les résultats des partis de gouvernement traduisent un désaveu des Français.
 
Si le FN a bénéficié à plein de cette élection, il en est tout autrement pour le Front de Gauche qui réalise un score assez décevant avec 6,34 %. Bien qu'en pointe sur la lutte contre l'austérité et le traité transatlantique, le Front de Gauche n'a pas obtenu le résultat qu'il méritait. On peut penser que le manque de clarté dans le discours (position sur l'euro notamment) et les divisions passées à l'occasion des municipales ont pesé dans la balance. Sans parler du fait que l'électorat ouvrier visé se positionne davantage en faveur du Front National.
 
Parallèlement aux six forces traditionnelles qui trustent le haut du tableau (FN, UMP, PS, UDI-Modem, Europe-Écologie, Front de Gauche), on voit se développer dans ce scrutin deux "petits partis" portant tous deux une alternative et qui ont réalisé des scores plus qu'honorables au vu des leurs moyens. Je parle évidemment de Debout la République (3,82 %) et Nouvelle Donne (2,90 %). Bien sûr ces mouvements n'ont aucun élu au Parlement Européen et bien sûr ces résultats sont plutôt faibles. Mais il me semble important malgré tout de constater que ces partis ont nettement progressé par rapport aux dernières échéances électorales, à la fois en valeurs relative et absolue. Il sera alors intéressant de suivre l'évolution de ces partis lors des prochains scrutins.
 
Alors que retenir de ces élections ? Au final pas grand chose dans la mesure où tout était plus ou moins couru d'avance.
Au niveau national, on remarque une progression du FN en pourcentage mais pas forcément en nombre de voix. Ainsi que l'affaiblissement croissant des deux principaux partis de notre pays.
Au niveau européen, car il ne faut pas oublier que c'est de cela dont on parle, les conservateurs emportent la première place avec une courte majorité sur les sociaux démocrates. Bien que l'extrême-droite et les eurosceptiques progressent fortement par rapport à la précédente mandature, il est clair que le PPE et le PSE continueront à gouverner main dans la main. Bref, rien de nouveau sous le soleil d'Europe …

 

vendredi 23 mai 2014

Elections européennes : pour la souveraineté de la France !

"La France est notre patrie et l'Europe notre avenir". Telle était la formule lancée par François Mitterrand dans les années 1980.  Plus de trente après, cette phrase reste vraie pour un grand nombre de personnes et de partis politiques qui revendiquent leur attachement à l'Union Européenne. A l'inverse, d'autres courants expriment une pensée quelque peu différente s'opposant à cette Europe.
 
Et c'est justement entre ces différentes options que les électeurs auront à trancher dimanche. Car c'est bien en ce 25 mai qu'aura lieu le seul et unique tour des élections européennes. Comme tous les cinq ans, les Français auront donc la possibilité de s'exprimer sur leur vision de l'Europe.
 
Malgré des enjeux très importants pour notre pays, nous savons déjà que l'abstention sortira grande gagnante de ce scrutin. Outre des questions de date (fête des mères, arrivée des beaux jours, proximité avec les municipales), il est de coutume que les élections européennes n'attirent pas les foules et cette tendance s'accentue malheureusement d'année en année depuis la première élection en 1979.
 
Cela étant, pour ceux qui iront voter, le choix est on ne peut plus large. Tout du moins en quantité. Ainsi, dans le Sud-Est qui est ma circonscription de vote, 23 listes sont en compétition. Et le nombre est sensiblement le même dans les autres régions de France. Symbole d'un pluralisme ou dévoiement de la démocratie, chacun pourra en juger. Mais personnellement je trouve qu'il s'agit là d'une dérive de notre système démocratique qui conduit à la multiplication de listes de témoignage.
 
Attaché à la démocratie et au pluralisme politique, il peut paraître paradoxal de regretter le "surplus de candidats". Pour autant, je ne suis pas convaincu que cette situation serve la démocratie. Bien au contraire. En effet, on se retrouve aujourd'hui en présence de listes qui sortent de nulle part, sans réel programme européen et dont l'unique but est d'utiliser ce scrutin comme tribune pour leurs revendications. On remarque d'ailleurs que ces listes apparaissent pour la plupart uniquement à l'occasion des européennes et n'ont pas d'existence autre que cette élection. Sans parler d'une absence quasi-totale des panneaux électoraux et même des enveloppes contenant les professions de foi.
 
Heureusement internet existe et permet d'avoir accès à une information large et plurielle. Et chaque citoyen peut alors se renseigner sur chaque liste et faire son choix. Et c'est justement ce travail que j'ai cherché à effectuer. Suite à cela j'en suis arrivé à la conclusion qu'il existe quatre types de liste :
 
            - les listes européistes
Il s'agit de listes portées par des partis s'engageant clairement en faveur de l'Europe avec une tendance fédéraliste. On y retrouve notamment Europe Ecologie les Verts, l'UDI-Modem, le parti fédéraliste européen.
N'étant pas du tout sur cette ligne politique, je ne peux évidemment pas voter pour ces listes. En revanche, celles-ci ont au moins le mérite de la cohérence en affichant clairement leurs positions.
 
            - les listes de témoignage
Comme je le disais précédemment, ce sont des listes ayant des revendications ciblées mais sans réelle ambition européenne. Force Vie, Alliance royale, parti pirate … font parties de celles-ci. Outre des divergences de points de vue, je ne suis pas en adéquation avec les méthodes de ces partis.
 
            - les listes "schizophrènes"
UMP, PS, FN. Voila le tiercé gagnant des listes "schizophrènes". Pourquoi "schizophrènes" ? Pour la simple et bonne raison que ces partis tiennent un double discours entre Paris et Strasbourg. Bref, de vrais Janus des temps modernes. Comment continuer à croire les promesses de l'UMP et du PS (Europe sociale, réforme de l'espace Schengen …) alors que ces derniers n'ont rien fait lorsqu'ils étaient au pouvoir ? Comment faire confiance à des partis qui sont allés à l'encontre du référendum de 2005 en court-circuitant le peuple ?
Mais si l'UMP et le PS font la course en tête, le FN n'est pas loin derrière. Car il ne faut pas oublier que ce parti est présent au Parlement européen depuis plusieurs décennies. Et il est intéressant de constater que ses députés européens (famille Le Pen au premier chef) ne brillent pas par leur activité, sans parler de leur assiduité. Pire encore, leurs votes vont parfois à l'encontre des positions tenues en France, et notamment sur le traité transatlantique qui est un sujet majeur du moment. Et s'il fallait une raison supplémentaire de passer son chemin, outre les griefs traditionnels, la présence de Jean-Marie Le Pen et Bruno Gollnisch dans les premières places de la liste dans le Sud-Est me parait on ne peut plus suffisante.
 
            - les listes souverainistes
Et pour finir, pendant des listes fédéralistes, nous retrouvons les listes souverainistes. On peut en compter au minimum trois : Front de Gauche, Union Populaire Républicaine (UPR), et Debout la République (DLR). Ceux qui me connaissent quelque peu auront bien évidemment deviné que je penche en faveur de ces listes souverainistes.
Si j'ai effectivement quelques convergences avec le Front de Gauche (refus de l'austérité, lutte contre le traité transatlantique …), il n'en reste pas moins que des divergences existent (internationalisme, ambiguïté sur l'euro …), en particulier au niveau national.
S'agissant de l'UPR, j'ai quelques doutes sur la stratégie menée. D'une part, ce petit parti rejette toute discussion avec d'autres entités, ce qui me semble contre-productif. D'autre part, son programme européen se résume à sortir de l'Union Européenne par le biais de l'article 50 du traité de Lisbonne. En somme, on nous propose de nous engager dans un processus juridique long et complexe prévu par un traité dont la légitimité est remise en cause. Cela revient donc à persister dans un système que l'on dénonce et à suivre des règles que l'on rejette, ce qui est paradoxal. Par ailleurs, cette position conduit à privilégier le juridique au politique alors que je crois personnellement à la nécessité de réaffirmer la primauté du politique.
Reste alors les listes portées par Debout la République pour lesquelles je voterai dimanche. Outre ma proximité idéologique avec ce parti, je dois reconnaître que la campagne menée a été plutôt intéressante dans la mesure où elle a combiné critiques du système en place mais également propositions concrètes avec notamment la mise au point d'un traité alternatif de 26 articles.
 
Remettre en cause l'Union Européenne dans son fonctionnement actuel ne signifie pas être anti-européen contrairement à ce que peuvent dire certains médias et responsables politiques. Au contraire, c'est justement en dénonçant les dérives de cette Europe et en promouvant une nouvelle organisation plus démocratique, plus sociale et plus respectueuse des peuples qu'il sera possible de redorer l'idéal européen.
 
Partout en Europe les peuples se voient imposer une austérité sans fin et sont sommés de payer les pots cassés d'une crise dont ils ne sont pas responsables. Et les choses ne sont pas prêtes de s'améliorer dans la mesure où une oligarchie non élue négocie dans le plus grand secret un traité de libre échange avec les Etats-Unis. Traité qui aboutira sans douter à un nivellement par le bas de nos réglementations nationales.
 
Pour toutes ces raisons et plus encore, il est important d'aller voter dimanche. Il s'agit là d'une des seules possibilités pour les peuples d'Europe de s'exprimer et d'instiller un peu de démocratie dans cette machine infernale.
Et j'en terminerai par une phrase d'Albert Einstein qu'il conviendrait de méditer avant chaque élection : "Ne comptez pas sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre."

lundi 12 mai 2014

Réforme territoriale : sauvons nos départements !

François Hollande l'avait évoqué et Manuel Valls l'a confirmé, la réforme territoriale aura bien lieu. Et les choses s'accélèrent cette semaine avec la réception par le président de la République des responsables de partis représentés au Parlement. Après être revenu sur le projet élaboré par la droite dès le début du quinquennat, les socialistes s'attellent à leur tour à la tâche. Au programme notamment, suppression des départements et baisse du nombre de régions.
 
La question du millefeuille territorial en France ne date pas d'aujourd'hui et il est clair celui-ci doit être réformé, en particulier dans un objectif de rationalisation des dépenses publiques. Cela étant, je ne suis pas convaincu que la réforme portée par ce gouvernement soit la bonne. Leur constat de base est de considérer que notre pays comporte trop d'échelons et qu'il faut donc chercher à les réduire. Et c'est de ce constat que découle la volonté de supprimer les départements.
 
Personnellement, je n'aborde pas la question sous le même angle. On peut certes disserter sur le nombre de départements ou de régions mais je considère qu'il est plus intéressant de se pencher sur l'articulation entre ces différentes collectivités. Autrement dit, ce n'est pas tellement l'existence même des départements ou régions en tant qu'entité administrative qui pose problème mais plutôt leurs champs d'action qui se recoupent souvent. C'est donc à ce niveau là, en termes de compétences, qu'il faut agir.
 
A mon sens la suppression des départements est une mesure simpliste qui s'inscrit dans une logique purement comptable et non dans une vision politique de long terme. En effet, par cette action, le gouvernement cherche à couper à la hache dans une source de coûts, les conseils généraux. Raisonnement on ne peut plus simple : les départements nous coûtent trop cher donc supprimons les départements. Raisonnement qui peut d'ailleurs être tenu pour bien d'autres entités : communes, régions … et pourquoi pas l'État ?
 
Je crois donc que le problème se pose en des termes quelque peu plus complexes. Effectivement les collectivités locales sont réputées pour être dépensières et peu économes en personnel. Encore que cela peut se discuter sur certains points. Mais passons.
Il ne faut pas oublier que ces mêmes collectivités bénéficient d'une capacité d'investissement et possèdent des compétences propres, autrefois attribuées à l'État et qui ont été déléguées aux régions et départements dans le cadre de la décentralisation. L'objectif étant, je le rappelle, de rapprocher les centres de décision des citoyens. Supprimer les départements reviendrait donc à remettre en cause un pan entier de cette politique et à revenir à un système plus concentré et plus éloigné de la population. Si cela sera probablement sans effet notable en ville du fait de l'importance des communautés de communes, l'impact en sera d'autant plus grand en zone rurale. Par ailleurs, mais cela peut paraître plus anecdotique pour certains, les départements sont un héritage de notre passé.
 
Mais laissons de côté l'aspect politique pour nous concentrer sur des considérations économiques. Car c'est bien de cela dont il s'agit au final dans la mesure où la motivation unique principale est d'ordre financier. L'objectif attendu est clairement de faire des économies. Mais cela n'est malheureusement pas aussi simple qu'il n'y parait. Car comme nous l'avons dit les départements ont des missions propres (collèges, RSA, pompiers, routes départementales …) qui seront obligatoirement transférées à d'autres entités comme les régions ou les communautés de communes. Ce qui sous-entend évidemment que les coûts inhérents ne disparaitront pas. Tout au plus nous aurons quelques économies d'échelle ou synergies mais sans aucune certitude.
 
En revanche, et c'est là la vraie source d'économies, les départements bénéficient d'une clause de compétence générale comme les régions. Autrement dit, ces collectivités peuvent intervenir librement dans des champs de compétences autres que leurs attributions. Et cela occasionne très souvent des doublons ou des redondances, notamment entre départements et régions voire même avec l'État. Cela conduit alors à un saupoudrage d'aides publiques sans réelle cohérence d'ensemble et donc source des gaspillages.
 
A la lumière de ces différents éléments, la suppression de l'entité administrative "département" ne parait plus être la solution miracle présentée. Cela ne veut toutefois pas dire que rien ne doit être entrepris. Bien au contraire. Mais cela ne passe pas forcément par une suppression arbitraire de nos chers départements.
En ce sens, la réforme entreprise en son temps par Nicolas Sarkozy avec la création d'un conseiller territorial n'est pas totalement à rejeter comme l'ont fait les socialistes. Je crois au contraire que l'ambition de regrouper les élus des conseils régionaux et généraux est une bonne chose. Et je reprends d'ailleurs cela à mon compte en proposant que les conseillers généraux soient élus, comme c'est le cas aujourd'hui, sur la base des cantons et que ce soient ces mêmes élus qui siègent dans les conseils régionaux. Cela permettrait ainsi de limiter le nombre d'élus tout en gardant des élus locaux de proximité.
Par ailleurs, il me parait impératif de revoir les missions de chaque entité en clarifiant bien les domaines d'actions de chacune afin d'éviter tout recoupement ou doublon. Et cela passe bien évidemment par la suppression de la clause générale de compétence.
 
La mise en place conjointe de ces deux mesures permettrait ainsi de conserver des collectivités proches des citoyens et des lieux d'action tout en rationnalisant leurs dépenses publiques par une baisse du nombre d'élus et une remise à plat des champs de compétences.
Voila les deux objectifs que François Hollande devrait poursuivre au travers de sa réforme des collectivités territoriales. Cela ne semble toutefois pas le chemin emprunté pour le moment. On pourrait d'ailleurs s'interroger sur la réelle ambition de cette réforme : améliorer la situation du pays ou entreprendre un chantier d'ampleur, même non nécessaire et démesuré, afin de laisser une trace de son passage ? Intérêt général ou intérêt personnel, là encore la question se pose …