Après l'UMP et le PS, c'est le MRC (Mouvement
Républicain et Citoyen) qui organisait ce week-end son congrès à Paris. Rien de
plus normal en cette période me direz-vous. Mais un évènement est venu perturber
les réjouissances, ce qui a conduit à une attention particulière des médias. Il
s'agit bien évidemment de la démission de Jean-Pierre Chevènement de la
présidence d'honneur du parti qu'il avait fondé en 2003.
"Je souhaite reprendre ma liberté. Comme tout parti
politique, le MRC obéit à une logique. Je suis au-delà des logiques partisanes.
Le MRC a sa logique et moi j'ai la mienne. Je veux m'exprimer en toute liberté
sur l'école, le collège, l'Europe, la crise grecque, l'Ukraine, le terrorisme."
Cette démission n'est pas la première pour
Chevènement car l'ancien ministre de François Mitterrand est coutumier du fait.
Il avait ainsi quitté ses responsabilités gouvernementales en 1983 puis en 1991
afin d'exprimer son désaccord sur la politique menée. Celui-ci avait d'ailleurs
prononcé une phrase restée célèbre : "un ministre ça ferme sa gueule, et si ça veut l'ouvrir, ça démissionne". Certains aujourd'hui feraient
bien de méditer sur ces propos.
Suite à cette mise en retrait du MRC, Jean-Pierre
Chevènement appelle aujourd'hui dans une interview au Parisien à transcender le
clivage gauche-droite qui selon lui "ne
correspond plus à la réalité". Autrement dit, il s'agit de créer "une
alternative républicaine dans une démarche de rassemblement sans sectarisme, de
Mélenchon à Dupont-Aignan".
Appréciant le personnage et les valeurs qu'il incarne, cela fait maintenant
plusieurs années que je suis le parcours de Jean-Pierre Chevènement. Je me
retrouve d'ailleurs dans un grand nombre de ses prises de position et en
particulier sur l'europe. Cela étant, j'ai toujours regretté que le MRC
s'enferme dans une alliance mortifère avec le PS. Bien sûr il s'agissait de
maintenir le parti à flot, à la fois en termes de visibilité et de finances, en
négociant des places éligibles. Mais le résultat n'est pas forcément à la
hauteur et nuit considérablement, à mon sens, à la cohérence du mouvement. On
peut ainsi constater que le MRC est considéré par son grand frère socialiste
comme une force d'appoint ponctuelle qui peut être aisément sacrifiée en cas
d'alliances jugées plus stratégiques (PCF, EELV). Cet enfermement risque alors
de conduire le MRC à une extinction progressive et le départ de son fondateur
n'arrangera en rien les choses.
Si Jean-Pierre Chevènement aura mis le temps, je ne peux que me réjouir de
sa récente prise de position. Indéniablement le clivage gauche-droite est de
plus en plus désuet, notamment en matière économique. Comme disait Philippe
Séguin en son temps, "l'UMP et le PS
sont deux détaillants qui se fournissent chez le même grossiste, l'europe."
Et la politique menée aujourd'hui par François Hollande, qui s'inscrit dans la
lignée de Nicolas Sarkozy, en est la parfaite illustration. Vouloir à tout prix
maintenir l'illusion d'une incompatibilité totale de ces partis de gouvernement
n'a que pour unique objectif de perpétuer une alternance stérile des forces au
pouvoir.
La démission de Jean-Pierre Chevènement et la main tendue à Jean-Luc Mélenchon
et Nicolas Dupont-Aignan est un premier pas. Évidemment il existe des
différences entre ces trois hommes mais il existe également de nombreuses
convergences en particulier sur l'europe, l'euro, l'austérité ... J'espère ardemment
que ceux-ci sauront passer outre les questions d'étiquette afin d'aboutir à une
plate-forme commune de réflexion.
A l'époque Chevènement avait déjà tenté, en vain, de
réunir les républicains des deux rives. Espérons que cette nouvelle tentative rencontre
une issue plus favorable. Après la guerre, gaullistes et communistes ont su se
rassembler dans l'intérêt de la nation au sein du CNR (Conseil National de la
Résistance). N'attendons pas que notre pays soit dans le même état pour réagir.