lundi 15 juin 2015

Pour une alliance des républicains des deux rives !

Après l'UMP et le PS, c'est le MRC (Mouvement Républicain et Citoyen) qui organisait ce week-end son congrès à Paris. Rien de plus normal en cette période me direz-vous. Mais un évènement est venu perturber les réjouissances, ce qui a conduit à une attention particulière des médias. Il s'agit bien évidemment de la démission de Jean-Pierre Chevènement de la présidence d'honneur du parti qu'il avait fondé en 2003.
"Je souhaite reprendre ma liberté. Comme tout parti politique, le MRC obéit à une logique. Je suis au-delà des logiques partisanes. Le MRC a sa logique et moi j'ai la mienne. Je veux m'exprimer en toute liberté sur l'école, le collège, l'Europe, la crise grecque, l'Ukraine, le terrorisme."

Cette démission n'est pas la première pour Chevènement car l'ancien ministre de François Mitterrand est coutumier du fait. Il avait ainsi quitté ses responsabilités gouvernementales en 1983 puis en 1991 afin d'exprimer son désaccord sur la politique menée. Celui-ci avait d'ailleurs prononcé une phrase restée célèbre : "un ministre ça ferme sa gueule, et si ça veut l'ouvrir, ça démissionne". Certains aujourd'hui feraient bien de méditer sur ces propos.

Suite à cette mise en retrait du MRC, Jean-Pierre Chevènement appelle aujourd'hui dans une interview au Parisien à transcender le clivage gauche-droite qui selon lui "ne correspond plus à la réalité". Autrement dit, il s'agit de créer "une alternative républicaine dans une démarche de rassemblement sans sectarisme, de Mélenchon à Dupont-Aignan".

Appréciant le personnage et les valeurs qu'il incarne, cela fait maintenant plusieurs années que je suis le parcours de Jean-Pierre Chevènement. Je me retrouve d'ailleurs dans un grand nombre de ses prises de position et en particulier sur l'europe. Cela étant, j'ai toujours regretté que le MRC s'enferme dans une alliance mortifère avec le PS. Bien sûr il s'agissait de maintenir le parti à flot, à la fois en termes de visibilité et de finances, en négociant des places éligibles. Mais le résultat n'est pas forcément à la hauteur et nuit considérablement, à mon sens, à la cohérence du mouvement. On peut ainsi constater que le MRC est considéré par son grand frère socialiste comme une force d'appoint ponctuelle qui peut être aisément sacrifiée en cas d'alliances jugées plus stratégiques (PCF, EELV). Cet enfermement risque alors de conduire le MRC à une extinction progressive et le départ de son fondateur n'arrangera en rien les choses.

Si Jean-Pierre Chevènement aura mis le temps, je ne peux que me réjouir de sa récente prise de position. Indéniablement le clivage gauche-droite est de plus en plus désuet, notamment en matière économique. Comme disait Philippe Séguin en son temps, "l'UMP et le PS sont deux détaillants qui se fournissent chez le même grossiste, l'europe." Et la politique menée aujourd'hui par François Hollande, qui s'inscrit dans la lignée de Nicolas Sarkozy, en est la parfaite illustration. Vouloir à tout prix maintenir l'illusion d'une incompatibilité totale de ces partis de gouvernement n'a que pour unique objectif de perpétuer une alternance stérile des forces au pouvoir.

La démission de Jean-Pierre Chevènement et la main tendue à Jean-Luc Mélenchon et Nicolas Dupont-Aignan est un premier pas. Évidemment il existe des différences entre ces trois hommes mais il existe également de nombreuses convergences en particulier sur l'europe, l'euro, l'austérité ... J'espère ardemment que ceux-ci sauront passer outre les questions d'étiquette afin d'aboutir à une plate-forme commune de réflexion.

A l'époque Chevènement avait déjà tenté, en vain, de réunir les républicains des deux rives. Espérons que cette nouvelle tentative rencontre une issue plus favorable. Après la guerre, gaullistes et communistes ont su se rassembler dans l'intérêt de la nation au sein du CNR (Conseil National de la Résistance). N'attendons pas que notre pays soit dans le même état pour réagir.

lundi 8 juin 2015

Allez Arnaud, encore un effort !

Suite au vote sur les motions le 21 mai dernier, le Parti Socialiste organisait son congrès ce week-end. Et celui-ci se déroula finalement sans accro majeur, comme on pouvait s'y attendre. Sans accro certes mais sans grand enthousiasme non plus. Un peu à l'image du congrès des Républicains finalement.

Serait-ce une coïncidence ? Je ne le crois pas. Bien qu'encore puissants, notamment en raison de la prééminence du bipartisme, l'UMP et le PS sont en perte de vitesse depuis plusieurs années. Et leur grande proximité idéologique en matière économique ainsi que leurs arrangements avec l'éthique n'y sont pas pour rien. Mais passons.

Si de nombreux dirigeants socialistes étaient présents à Poitiers, il en est un en particulier qui a longuement fait parler de lui. Je pense bien évidemment à Arnaud Montebourg qui a consigné dans le Journal Du Dimanche une tribune avec Mathieu Pigasse. Si l'association des deux peut surprendre au premier abord, il n'en reste pas moins que le duo n'hésite pas à tacler ouvertement le gouvernement et à remettre en question la politique menée.      
Voici quelques extraits choisis de ce texte :

Prenant la mesure de la gravité de la situation, peut-être serait-il nécessaire que nos dirigeants cessent de commenter ce que fait ou dit le FN ou que cesse encore cette culpabilisation inutile des électeurs dans cette "lutte" purement verbale et artificielle "contre" le Front national. On serait, au contraire, bien avisé d'agir sur les causes réelles et profondes qui jettent des millions de Français dans ses bras : l'explosion du chômage, la hausse de la pauvreté et la montée du sentiment de vulnérabilité dans presque toutes les couches de la société française. 

Ainsi, le conformisme politique est désormais devenu le principal adversaire du renouveau économique du pays. C'est lui qui nous paralyse et chaque mois qui passe le rend plus insupportable. Au fil des alternances, les Français votent en conscience pour la "rupture" ou le "changement" mais s'aperçoivent que la politique économique – donc européenne – qui s'ensuit est toujours la même. Tout président élu commence par aller faire ses génuflexions à Berlin puis à Bruxelles, enterrant en 72 heures ses engagements de campagne. Et voici des années que cette comédie de l'impuissance publique dure, pour bientôt finir par engloutir la démocratie dans notre pays.

Agir, cela veut dire ne pas faire payer la facture des déficits publics créés par les errements de la finance privée dans la crise, par les classes moyennes. Cela veut dire se battre pour la croissance en interrompant les politiques absurdes, inefficaces et anti-économiques de Bruxelles, et rendre sous forme de baisses d'impôts ce qui a été lourdement prélevé sur les ménages (plusieurs dizaines de milliards d'euros). Cela veut dire ne plus se laisser faire par Berlin et Bruxelles et changer la politique économique nationale et européenne.

C'est avec un plaisir non dissimulé que j'ai pris connaissance de cette tribune hier. Je ne peux d'ailleurs que souscrire à ces propos dans la mesure où ils expriment parfaitement mon positionnement sur le sujet. Cela étant, je ne peux faire abstraction à la fois de l'auteur et du contexte dans lequel ce papier est écrit. En effet, cette sortie intervient en plein congrès du PS et alors même qu'Arnaud Montebourg s'est mis (provisoirement ?) en retrait de la vie politique.

Alors acte prémédité ou simple concours de circonstances ? Personnellement je ne crois que faiblement au hasard. Et cela d'autant moins lorsqu'il s'agit de politique. On peut donc légitimement penser que la sortie médiatique d'Arnaud Montebourg s'inscrit dans une stratégie plus large dont la finalité est pour l'heure assez floue. Et c'est bien là toute la problématique. Candidat à la primaire socialiste en faveur de la démondialisation puis ministre d'un gouvernement prônant l'austérité avant d'en être évincé, Montebourg se révèle avoir un parcours singulier dont la cohérence peut être interrogée. Et cette nouvelle prise de position n'aide que faiblement à la compréhension.  
A la fois dedans et dehors, membre de la majorité mais critique vis-à-vis de la ligne du gouvernement, le positionnement de Montebourg est on ne peut plus ambigu. Ce qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler le comportement des frondeurs.

Si cette remise en cause de la politique menée par François Hollande et Manuel Valls est un premier pas, elle ne saurait être suffisante et ne peut constituer une fin en soi. Il me semble impératif, vu l'urgence de la situation, que nos responsables politiques prennent une bonne fois pour toutes leurs responsabilités en mettant leurs actes en conformité avec leurs paroles.

Vouloir changer le parti de l'intérieur est une utopie. Certains ont essayé et ont échoué (Mélenchon, Dupont-Aignan). Mais ils ont eu le courage de faire sécession pour défendre leurs idées. Vouloir à tout prix se maintenir dans une contestation interne conduit irrémédiablement à  une extinction progressive de son influence comme ce fut le cas de Chevènement.

Alors Arnaud, encore un petit effort ! Ne ruine pas à nouveau les espoirs que certains fondent en toi.

mardi 2 juin 2015

De quoi Les Républicains est-il le nom ?

Malgré quelques bisbilles avec la Justice et de nombreuses polémiques, le changement de nom de l'UMP a finalement été approuvé à 83 % (taux de participation de 46 %). Et c'est ce samedi 30 mai que s'est tenu le congrès fondateur du nouveau parti de droite qu'est "Les Républicains".

Treize ans après sa création, l'UMP (Union pour un Mouvement Populaire) change de nom sous l'impulsion de son président Nicolas Sarkozy. Si le parti majoritaire à droite s'est maintes fois métamorphosé (RPF, UNR, UDR, RPR …), ce dernier changement me laisse davantage perplexe. En effet, si la naissance de l'UMP pouvait se comprendre par la volonté de réunir trois composantes de la droite (libéraux, gaullistes …), il ne me semble pas en être de même pour Les Républicains. Quelle motivation profonde pour ce nouveau nom si ce n'est de faire table rase du passé et en particulier des affaires judiciaires (Bygmalion …) ?   

Mais revenons à ce fameux congrès fondateur. Avec un budget limité à environ 500 000 €, l'équipe dirigeante a fait le choix d'un meeting low-cost simple ou en tout cas nettement plus modeste que les précédents. Cela étant, les organisateurs attendaient 20 000 personnes et seulement la moitié, ce qui n'est déjà pas si mal, se sont présentées. Une petite déception donc.

A quoi avons-nous assisté au final ? Rien de bien nouveau malheureusement. Une grand-messe on ne peut plus traditionnelle où une cinquantaine d'orateurs se sont succédés à la tribune sans susciter de véritable engouement. Il a fallu attendre les prises de parole de François Fillon et Alain Juppé pour que la salle commence, certes par des huées, à réagir. Seul Nicolas Sarkozy a su réellement soulever les foules lors de son discours. Je tenais d'ailleurs à m'arrêter quelques instants sur cette fameuse intervention tant elle me parait être particulièrement représentative de ce qu'était l'UMP et de ce que sera Les Républicains.
 
Sur la forme d'abord, on pourrait comparer cela à la prestation d'un chanteur lors d'un concert tant la salle était hystérique. Plus que le parti, les personnes présentes étaient clairement là pour voir Nicolas Sarkozy. Et celui-ci a fait ce qu'il sait faire de mieux : galvaniser les foules et dorloter ses fans. Or c'est justement cela qui me gêne au plus haut point. Considérant que les hommes politiques ne sont pas et ne doivent pas être des people comme les autres, j'ai beaucoup de mal à comprendre ce phénomène de fanatisme autour de nos dirigeants. Comment garder un semblant de réalisme et d'esprit critique avec une telle adulation ? Mais n'est-ce pas finalement ce que les politiques recherchent, une masse d'adeptes totalement soumis ?

Sur le fond, le discours m'a paru complètement hors de propos et en décalage avec l'occasion. Nicolas Sarkozy s'est lancé dans une longue et virulente critique, parfois caricaturale, de la gauche et du gouvernement mélangeant mariage pour tous, réforme du collège, immigration …   Celui-ci a ensuite fait l'éloge de la République, de la nation et de la démocratie ce qui est à la fois comique et tragique dans la mesure où c'est le même Nicolas Sarkozy, alors président de la République, qui a piétiné ces valeurs. Je pense notamment, même si ce n'est qu'un exemple parmi d'autres, au vote par le Parlement du traité de Lisbonne en 2008 alors que ce texte avait été rejeté par le peuple lors du référendum de 2005.

Il est en réalité assez navrant de voir le leader de l'un des principaux partis de notre pays se présenter en héraut de la République vu son passé et son passif. Outre tous ses démêlés avec la Justice, il ne faut pas oublier que Nicolas Sarkozy a été de longues années en responsabilités, particulièrement entre 2007 et 2012. Il me parait alors trop facile de tenir un tel discours en passant volontairement sous silence son passage au pouvoir.

Si ce congrès fondateur devait être le début d'une nouvelle aventure, je crois que le pari est manqué. Outre le changement de nom, dont le choix est plus que discutable, on ne retiendra que peu de choses de ce meeting si ce n'est les sifflets pour Juppé et Fillon. 
Personnellement je pense que cette métamorphose est une fumisterie visant davantage à occuper la scène médiatique qu'à se poser en réelle alternative. Il n'y a qu'à regarder le nom des différents intervenants pour se rendre compte que le changement ce n'est définitivement pas pour maintenant.
Mais plus encore, c'est l'absence quasi-totale de propositions et de projet pour le pays qui est le plus inquiétant. Arriver devant François Hollande en 2017 n'est pas une fin en soi et ne peut pas être le seul objectif de Nicolas Sarkozy et de l'opposition. Enfin en théorie …