lundi 18 mars 2013

Plumons les banques pour sauver les peuples, pas l'inverse !

La zone euro et le FMI ont trouvé samedi matin un accord sur un plan de sauvetage d'un maximum de 10 milliards d'euros pour Chypre, en échange d'une taxe exceptionnelle sur les dépôts bancaires qui rapportera près de 6 milliards. Nicosie devient ainsi le cinquième pays de la zone euro à bénéficier d'un programme d'aide internationale.
Mais, chose nouvelle, pour réduire leur participation, les bailleurs de fonds ont demandé à Nicosie d'instaurer une taxe exceptionnelle de 6,75 % sur les dépôts bancaires en deçà de 100 000 euros, et de 9,9 % au-delà de ce seuil, ainsi qu'une retenue à la source sur les intérêts de ces dépôts. Ces prélèvements devraient rapporter au total 5,8 milliards d'euros, a indiqué samedi le chef de file de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem. À ces taxes s'ajoutent des privatisations et une hausse de l'impôt sur les sociétés, qui passera de 10 à 12,5 %.
Source : lepoint.fr
 
Sauve qui peut ! Voila qui pourrait résumer les scènes de cohue aperçues ces derniers jours à Chypre. En effet, depuis l'annonce de ce "plan de sauvetage", des milliers de Chypriotes se sont pressés aux guichets des banques pour vider leurs comptes bancaires, ce qui n'est pas sans rappeler la crise de 1929 durant laquelle des millions d'américains avaient fait de même.
Si cette mobilisation populaire massive est on ne peut plus logique et compréhensible, on peut malgré tout penser que ces efforts seront vains dans la mesure où les autorités auront sûrement pris leurs précautions pour contrecarrer ce phénomène.
 
Cela étant, il s'agit clairement d'une mesure singulière. Singulière au niveau européen dont c'est la première mise en œuvre. Mais singulière également sur le principe même de cette taxation. A mon sens, il ne s'agit ni plus ni moins que d'une "spoliation (il)légale", pour ne pas dire un vol en bonne et due forme des citoyens.
Car c'est bien de cela dont il est question en vérité. De fait, toute personne ayant des avoirs domiciliés sur l'île s'en verra déposséder d'une partie sans pouvoir s'y opposer. De là à y voir une remise en cause du droit de propriété …
 
Si je suis favorable à un interventionnisme économique de l'Etat et si je peux entendre que des efforts sont nécessaires en temps de crise, je suis néanmoins farouchement opposé à ce procédé que je trouve malhonnête et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord, il apparaît que l'objectif premier est de venir en aide à des établissements financiers et bancaires. Or on peut remarquer que ce plan exclut une participation des créanciers privés par le biais d'un effacement de dette. Ainsi, seule la population sera mise à contribution. Ensuite, cette mesure est une fois de plus imposée par la troïka (UE, BCE, FMI) dans la droite ligne de leur politique d'austérité qui s'est révélée au mieux inefficace, au pire destructrice pour les économies européennes. Enfin il ne faut souligner que cet énième plan européen est la conséquence directe de la participation de Chypre au "sauvetage  de la Grèce", dégradant ainsi la situation du pays.
 
Une fois encore ce sont donc des institutions supranationales non élues qui se chargent d'imposer leur volonté ultralibérale aux peuples. Une fois encore ce sont les peuples qui sont sacrifiés sur l'autel du profit. L'UE et l'euro devaient nous apporter paix, croissance et prospérité. Mais c'est finalement tout le contraire que l'on nous sert aujourd'hui : troubles sociaux, misère et pauvreté sont devenus le quotidien de millions d'européens. Et au lieu d'une légitime et souhaitable remise en question, nos dirigeants persistent aveuglément dans leur dogmatisme.
 
A l'heure où j'écris ces lignes, ce plan n'a pas encore été adopté par le Parlement chypriote. Et visiblement rien n'est encore fait tant une majorité sera difficile à trouver. Espérons que les parlementaires sauront faire preuve de courage et de fermeté au moment de défendre leur souveraineté nationale. Plus que des considérations purement locales, c'est une partie de l'avenir de l'Union Européenne qui se joue aujourd'hui à Chypre. Car si cette mesure est adoptée, gageons que les technocrates de Bruxelles et Washington chercheront à la généraliser à toutes les nations d'europe. Et si cela arrive, comme cela arrivera probablement à plus ou moins longue échéance, alors il faudra s'attendre à une forte mobilisation des peuples. Mobilisation légitime qui risque même de se transformer en une révolte explosive avec les excès que cela peut engendrer.