samedi 12 avril 2014

Valls, 1er ministre … de Sarkozy ?

Suite à sa nomination comme premier ministre la semaine dernière, Manuel Valls a prononcé ce mardi son discours de politique générale. Et c'est devant une assemblée digne d'une cour d'école que l'ancien ministre de l'Intérieur a obtenu la confiance des députés (306 pour, 239 contre et 26 abstentions).
 
Comme je l'exprimais dans un précédent article, cette nomination n'est pas vraiment surprenante et s'inscrit certainement dans une stratégie politicienne du président de la République. Mais là n'est pas la question. En revanche, comme je l'avais annoncé, ce changement de gouvernement n'influe en rien sur la politique menée. Pire, elle tend même à l'accélérer.
 
Il est vrai que Manuel Valls est quelqu'un que j'apprécie assez au PS. Et notamment sa ferveur patriote et républicaine que l'on sent particulièrement bien à la fin de son discours. En revanche, et j'ai pris réellement conscience de cela durant la primaire socialiste, j'ai nettement plus de mal avec son côté libéral. Et c'est justement cet aspect là qui ressort majoritairement de ses propos.
 
Une phrase de ce discours résume à merveille la teneur de la politique économique menée actuellement dans notre pays : "Soutenir les entreprises, c'est soutenir l'emploi, l'investissement, les exportations". La volonté affichée ici est donc clairement de mener une politique de l'offre visant à favoriser les entreprises dans l'objectif (illusoire) de créer de l'emploi. Concrètement, cela revient, encore une fois, à exonérer de charges sociales les entreprises ou à alléger leur fiscalité pour soi-disant améliorer leur compétitivité et leur permettre ainsi d'embaucher.
 
Et les mesures annoncées en ce sens ne manquent pas : suppression des charges patronales versées à l'Urssaf pour un salarié au SMIC, baisse des cotisations à la branche famille comprise entre 1,8 et 3 points, suppression de la C3S (Contribution Sociale de Solidarité des Sociétés), baisse du taux de l'impôt sur les sociétés de 33 % à 28 % ... On notera toutefois, afin de contrebalancer quelque peu le côté pro-Medef, un effort à l'attention des salariés avec une baisse des cotisations salariales permettant une augmentation du salaire net.
Faisant preuve d'une originalité à toute épreuve, le premier ministre avance donc des propositions largement utilisées dans le passé et qui ont toutes montré leurs limites, leur inefficacité voire même leurs effets pervers. En effet, cela maintenant plusieurs décennies que les gouvernements successifs, de droite ou de gauche d'ailleurs, ont recours aux exonérations de charges sans réel effet sur le chômage. Sans parler du fait que ces mesures concernent principalement les salariés au SMIC, incitant les entreprises à recourir au salaire minimum légal et pénalisant de fait les personnes ayant un salaire légèrement supérieur.
 
Parallèlement à ces aspects sociaux et fiscaux, l'autre pendant du discours concerne les questions de réduction des dépenses publiques. Là encore rien de nouveau et tout le pays sera mis à contribution : 19 milliards pour l'État, 10 milliards pour l'assurance maladie et 10 milliards pour les collectivités locales. Au final, 50 milliards d'économies sont attendues entre 2015 et 2017. On peut également ajouter à cela la réduction de moitié du nombre de régions et la suppression des conseils départementaux d'ici 2021. Bref, une vraie réorganisation des collectivités afin de simplifier notre "millefeuille territorial".
 
Voila donc pour l'essentiel du discours de Manuel Valls. En somme et pour faire court : baisse de cotisations et impôts pour les entreprises et réduction des dépenses publiques. Tels sont donc les deux axes de la politique que mènera ce nouveau gouvernement socialiste !
Car oui, il ne faut pas l'oublier, François Hollande, Manuel Valls et la quasi-totalité des membres du gouvernement sont tous membres du PS, principal parti de la gauche française.
 
Une petite pensée, pour finir, pour tous les électeurs de François Hollande qui ont glissé son nom dans l'urne en 2012 afin de chasser Nicolas Sarkozy du pouvoir. Une petite pensée pour tous ceux qui, en entendant ce discours de politique générale, se sont crus revenir sept ans plus tôt lorsque François Fillon se tenait à son tour devant les députés. Une petite pensée pour tous ceux qui commencent enfin à prendre conscience que PS et UMP mènent sensiblement la même politique austéro-libérale ...

samedi 5 avril 2014

Changer d'équipe c'est bien, changer de politique c'est mieux !

La nouvelle est donc tombée cette semaine. A la suite du second tour des municipales de dimanche dernier, et comme cela était attendu depuis longtemps, François Hollande a procédé à un remaniement ministériel. Si certains s'attendaient à un grand chamboulement, il s'avère finalement que peu de changements sont intervenus. Plus qu'un tournant dans le mandat, il s'agit plutôt là d'un changement dans la continuité.
 
Bien que cela semblait nécessaire, voire indispensable, le doute a longtemps subsisté autour de la nomination d'un nouveau premier ministre. Et c'est ainsi Manuel Valls, précédemment ministre de l'Intérieur, qui succède à Jean-Marc Ayrault. Peu de surprise en somme tant il faisait office de favori. En revanche, si ce choix est assez logique de la part de François Hollande, en particulier afin de bénéficier de l'aura de son ministre, celui-ci peut être à double tranchant. Si Valls a clairement une ambition présidentielle, pouvant ainsi mettre en difficulté le président actuel, cette nouvelle fonction peut agir sur lui comme une rampe de lancement pour la suite mais peut également le conduire à exploser en plein vol en cas de mauvais résultats. Reste à savoir si Manuel Valls réussira à tirer profit ou non de la situation.
 
Parallèlement au cas du premier ministre, on peut noter l'absence des Verts dans ce nouveau gouvernement. Et personnellement, je m'en réjouis. Non pas que l'action des ministres écolos ait été plus mauvaise que les autres mais je n'affectionne pas particulièrement ce parti. Cela étant, ce départ me paraît tout à fait logique dans la mesure où la participation à une équipe gouvernementale requiert une certaine solidarité qui n'était pas toujours de mise chez Cécile Duflot et Pascal Canfin. Comme disait Chevènement en son temps, "un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne".
 
Enfin, et pour en terminer avec ce jeu de chaises musicales, on ne peut que souligner le retour de Ségolène Royal au ministère de l'écologie. Nomination on ne peut plus stratégique qui fait revenir sur le devant de la scène la candidate de 2007, jusqu'ici laissée de côté. La fin de l'exil de Royal serait-il lié à la disgrâce de Trierweiler ?
 
Alors, au final, qu'attendre de ce nouveau gouvernement ?
En réalité pas grand chose selon moi. Effectivement les personnes ont changé. Encore que l'on pouvait s'attendre à davantage de mouvements en réaction à l'échec des municipales. Mais peu importe les individus au final car ce n'est pas ce qui compte dans la gouvernance du pays. Plus que l'équipage donc, c'est réellement le cap suivi qui est primordial. Or point de changement dans la ligne de conduite de ce gouvernement. Bien au contraire, les ministres changent mais la politique reste.
 
Et c'est bien là tout le problème selon moi. Car avant même le remaniement, il était clair pour tout un chacun que la politique ne changera pas d'un iota de celle menée depuis le début du mandat. Le pacte de responsabilité figure toujours en tête des priorités du président et la politique de l'offre continuera encore à être l'alpha et l'oméga de Bercy. Austérité pour la population contre allégements de charges pour les entreprises, voila la politique économique du président de la République. Politique que ne renierait en rien son prédécesseur !
 
Pour l'heure, François Hollande a fait le choix de la continuité. Sa seule action, soit disant afin de tenir compte du message envoyé par les Français, a été de réaliser un remaniement a minima. Cela ne suffira clairement pas et il est très probable que le résultat des élections européennes soit similaire, voire pire, à celui des municipales. Gageons d'ailleurs que les scrutins à venir connaitront un sort identique tant qu'aucun changement de fond n'interviendra pas. Le tout étant de savoir si ce changement arrivera un jour ...