D’aucuns auront évidemment perçu le clin d’œil au poème « Liberté »
de Paul Éluard, véritable ode à la liberté face à l’occupation
allemande. Bien évidemment aucun parallèle sérieux ne peut être fait
entre les deux époques tant les situations sont éloignées. Pour autant,
l’idée sous-jacente à ce titre est d’attirer l’attention sur une
nouvelle attaque contre notre modèle social. Mais plus encore que les
traditionnelles économies à la petite semaine auxquelles nos chers
gouvernements nous avaient habitués, il s’agit là d’un véritable coup de
semonce à l’encontre de la sécurité sociale. Car l’annonce de Bruno Le Maire, qui a (été) rétropédalé depuis, consiste ni plus ni moins à
remettre en cause son fonctionnement même basé sur l’universalité : de
chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. Autrement dit, les
cotisations payées sont proportionnelles à la rémunération mais les
remboursements sont les mêmes pour tous, ce qui permet de faire intervenir
une certaine solidarité entre les plus aisés et les moins favorisés. Et
c’est justement cette logique que le ministre a remis en question en
suggérant de moduler les remboursements en fonction des revenus de
l’assuré. Le tout dans une pure perspective comptable d’économies
budgétaires.
Laissons de côté pour le moment,
même s’il faudra y revenir, ces histoires d’austérité, de déficit,
d’endettement et autres pactes européens. Et concentrons nous sur le
fond de la proposition qui, si elle n’est plus d’actualité pour l’heure,
constitue potentiellement un galop d’essai du gouvernement visant à
prendre le pouls du peuple sur le sujet. L’idée
consiste donc à réduire le montant des remboursements des frais
médicaux pour les plus aisés. Si l’on va donc au bout du concept, cela
signifie que ces personnes cotisent davantage que les autres (comme
actuellement) mais qu’ils seraient moins remboursés (ce qui serait
nouveau). Une véritable double peine donc pour toute une partie de la
population qui se sentirait à juste titre lésée. Et ce d’autant plus que
dans le même temps une autre partie de la population bénéficie de
soins presque gratuitement (CMU, AME …).
Dans
ces conditions, comment ne pas imaginer une large remise en question du
système par ces contributeurs, voire même l’apparition de velléités de
s’affranchir dudit système. Car quitte à payer cher, autant obtenir des
remboursements à la hauteur en contrepartie. Ce qui signifierait
inéluctablement la fin à plus ou moins court terme de notre système de
solidarité.
Eurêka aurait dit Archimède en
comprenant le principe de la poussée éponyme. Bruno Le Maire aurait-il
agi de même en mûrissant ce projet d’essence libérale, cette idée de
privatisation rampante de notre système de santé ? Ou s’est-il
simplement laisser conter fleurette de la part de ses amis du monde des
affaires (complémentaires santé, organismes de prévoyance …) ?
L’avenir nous le dira. A moins que la réponse ne soit déjà contenue dans son dernier livre …