mardi 16 avril 2024

Sécurité sociale, j'écris ton nom

D’aucuns auront évidemment perçu le clin d’œil au poème « Liberté » de Paul Éluard, véritable ode à la liberté face à l’occupation allemande. Bien évidemment aucun parallèle sérieux ne peut être fait entre les deux époques tant les situations sont éloignées. Pour autant, l’idée sous-jacente à ce titre est d’attirer l’attention sur une nouvelle attaque contre notre modèle social. Mais plus encore que les traditionnelles économies à la petite semaine auxquelles nos chers gouvernements nous avaient habitués, il s’agit là d’un véritable coup de semonce à l’encontre de la sécurité sociale. Car l’annonce de Bruno Le Maire, qui a (été) rétropédalé depuis, consiste ni plus ni moins à remettre en cause son fonctionnement même basé sur l’universalité : de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. Autrement dit, les cotisations payées sont proportionnelles à la rémunération mais les remboursements sont les mêmes pour tous, ce qui permet de faire intervenir une certaine solidarité entre les plus aisés et les moins favorisés. Et c’est justement cette logique que le ministre a remis en question en suggérant de moduler les remboursements en fonction des revenus de l’assuré. Le tout dans une pure perspective comptable d’économies budgétaires.

Laissons de côté pour le moment, même s’il faudra y revenir, ces histoires d’austérité, de déficit, d’endettement et autres pactes européens. Et concentrons nous sur le fond de la proposition qui, si elle n’est plus d’actualité pour l’heure, constitue potentiellement un galop d’essai du gouvernement visant à prendre le pouls du peuple sur le sujet. L’idée consiste donc à réduire le montant des remboursements des frais médicaux pour les plus aisés. Si l’on va donc au bout du concept, cela signifie que ces personnes cotisent davantage que les autres (comme actuellement) mais qu’ils seraient moins remboursés (ce qui serait nouveau). Une véritable double peine donc pour toute une partie de la population qui se sentirait à juste titre lésée. Et ce d’autant plus que dans le même temps une autre partie de la population bénéficie de soins presque gratuitement (CMU, AME …).
Dans ces conditions, comment ne pas imaginer une large remise en question du système par ces contributeurs, voire même l’apparition de velléités de s’affranchir dudit système. Car quitte à payer cher, autant obtenir des remboursements à la hauteur en contrepartie. Ce qui signifierait inéluctablement la fin à plus ou moins court terme de notre système de solidarité.

Eurêka aurait dit Archimède en comprenant le principe de la poussée éponyme. Bruno Le Maire aurait-il agi de même en mûrissant ce projet d’essence libérale, cette idée de privatisation rampante de notre système de santé ? Ou s’est-il simplement laisser conter fleurette de la part de ses amis du monde des affaires (complémentaires santé, organismes de prévoyance …) ?
L’avenir nous le dira. A moins que la réponse ne soit déjà contenue dans son dernier livre …