Mois de mai aidant, j'ai
profité des rares ponts de cette année pour reprendre le chemin de ma
bibliothèque afin de continuer ma lecture de livres politiques. Et la reprise
se fait en douceur avec un livre sorti récemment : "France lève-toi et
marche" de Nicolas Dupont-Aignan (NDA).
Partisan du personnage,
je ne m'attendais évidemment pas être déconcerté par cet ouvrage. Pour autant,
celui-ci m'a permis de découvrir un peu plus l'homme politique et son action.
Ce fut notamment le cas dans les premières pages où l'auteur nous expose son
parcours, depuis son enfance à son départ de l'UMP en 2007 en passant par son
élection comme maire de Yerres en 1995 et comme député de l'Essonne en 1997.
Si ces passages ne
relèvent pas strictement de la politique, ils permettent toutefois de mieux
cerner l'homme et de d'appréhender davantage son cheminement. Les paragraphes
sur son action au niveau local, et en particulier comme maire, illustrent cela
à merveille. Ravie à la gauche au 1er tour en 1995, Nicolas
Dupont-Aignan est systématiquement réélu depuis avec des scores soviétiques,
signe de confiance des habitants. Ayant pour slogan "la douceur de
vivre", l'édile explique avoir pour volonté de développer l'implication de
ses administrés dans la vie de la cité au travers d'une forte consultation
(conseils quartier, référendums locaux). Enfin, certaines de ses réalisations à
la tête de la ville sont évoquées : création d'un foyer pour femmes battues, financement
de 50% du permis pour les jeunes en échange de travaux d'intérêt général,
baisse de la délinquance, division par deux de la dette en 20 ans.
Outre ces aspects
locaux, l'auteur insiste sur un point essentiel de son parcours, à savoir sa
rupture avec l'UMP en 2007. Plus que l'évènement en tant que tel, celui-ci
permet également de poser la question du combat de l'intérieur avec la volonté de peser en interne et d'infléchir
les décisions de l'appareil. Cette détermination à influer sur un parti en
étant minoritaire est clairement illusoire comme nous pouvons le voir
actuellement avec les frondeurs socialistes ou par le passé avec Arnaud
Montebourg ou Jean-Pierre Chevènement. Remarquons d'ailleurs que Jean-Luc
Mélenchon s'est lui résolu à quitter le PS pour pouvoir proposer une
alternative. L'UMP et le PS sont aujourd'hui des machines de guerre au service
du modèle dominant et qui ne sauraient tolérer les têtes qui dépassent.
En ce sens, gauche et
droite se ressemblent et NDA renvoie gauche et droite dos à dos dans ce domaine
comme dans bien d'autres. Tous deux ont accompagné main dans la main la montée
en puissance d'une union européenne technocratique qui se fait sans les
peuples, pour ne pas dire contre les peuples. Tous deux ont sacrifié notre souveraineté
et notre pouvoir sur l'autel de l'europe (loi, monnaie, budget, frontières).
Face à tout cela, mais aussi face aux conflits d'intérêts et aux accointances
du monde politique et économique (autoroutes, fraude fiscale), nos concitoyens
ne peuvent que se résigner et perdre confiance en leurs dirigeants, se
réfugiant alors entre autres dans l'abstention.
Mais ce livre ne se
résume pas à une série de constats. Il est également l'occasion d'aborder
différents sujets tels que la crise agricole, les négociations en cours sur le TAFTA,
la protection des lanceurs d'alerte, la crise des migrants.
Parmi ces thèmes, l'un
a particulièrement attiré mon attention. Il s'agit du chapitre consacré au retour en
force des nations dans un monde multipolaire. Si Singapour ou l'Islande sont
cités, la France est bien évidemment longuement évoquée. Le président de Debout la France (DLF) commence par détailler les atouts de notre pays (démographie,
épargne, productivité, terroir, langue) puis en vient rapidement à un élément
central de notre système politique : l’État. A l'heure actuelle, l’État en tant
qu'institution est à la fois une force de par son existence et une faiblesse du
fait de son affaiblissement. Et c'est justement contre cet affaiblissement que
l'auteur veut lutter en faisant la promotion d'un Etat fort. Pour lui, et je le
rejoins complètement sur ce point, cela passe par trois aspects : un état
régalien (police, justice, armée), un état stratège (vision de long terme,
planification) et un état providence. Contrairement à de nombreuses
personnalités politiques, notamment à droite, Dupont-Aignan réaffirme
clairement la nécessité d'un état social et solidaire tout en exprimant le
souhait de lutter davantage contre l'assistanat, le gaspillage et la fraude (versement
du RSA en échange de 7h de travail par semaine au service de la collectivité,
suppression de l'Aide Médicale d’État (AME) parallèlement à l'ouverture de dispensaires,
instauration d'un délai de carence pour l'attribution des aides sociales aux
étrangers).
La dernière partie du
livre est elle dédiée à l'exposition de différentes propositions, véritables prémices
à un futur programme présidentiel. En voici quelques unes parmi beaucoup
d'autres :
- introduction
d'une dose de proportionnelle à l'Assemblée nationale
- réduction
du nombre de parlementaires
- organisation
de 5 référendums : justice, institutions, éducation, europe, immigration
- création
d'un statut de l'élu
-
financement direct de l’État par la banque de France
-
division par deux de l'impôt sur les sociétés pour les bénéficies réinvestis en
France
-
affichage de la part du fabriqué en France afin de réorienter la consommation
-
attribution des commandes publiques en priorité aux PME françaises
-
mise en place de mesures protectionnistes visant au respect de nos normes par
les importations
- développement
de l'actionnariat salarié permettant l'association capital/travail chère au
général de Gaulle
Pour en terminer avec
ce livre, je souhaitais reproduire ici un passage sur l'intercommunalité (p 222-223).
Alors que beaucoup, à droite comme à gauche, se jettent à corps perdu dans ce
nouvel échelon administratif, j'ai toujours exprimé des réserves sur ces regroupements
de communes. Et la création récente des métropoles avec toujours plus de
compétences ne fait que renforcer mon scepticisme face à ces organisations gargantuesques.
Comme j'aime à le dire, les métropoles sont l'union européenne du XXIème siècle
: des regroupements à marche forcée avec une tendance à s'arroger toujours plus
de compétences, en laissant parfois de côté le peuple. J'espère toutefois me
tromper et surtout que nos intercommunalités n'atteindront pas le niveau de
défiance et de contestation rencontrée actuellement par cette europe.
"Pour revivifier notre démocratie locale, il faut aussi changer de
cap en matière de regroupement des communes. Une chose est de rassembler, pour
faire des économies d'échelle entre plusieurs communes autour d'un besoin réel
(écoles, piscine, bibliothèque); une autre est de créer des intercommunalités
XXL qui dépossèdent complètement les élus, et donc leurs électeurs, de leur
pouvoir de contrôle tant en matière de dépenses que d'impôts. Quand une
communauté de communes regroupe, comme l'a décidé aujourd'hui la loi NOTRe, des
dizaines de communes sur des territoires très étendus (trente à quarante
kilomètres), le représentant du conseil municipal qui siège dans un conseil
communautaire d'une centaine de membres ne pèse plus rien. Il n'ose plus ouvrir
la bouche et, s'il l'ouvre, on lui cloue le bec.
Le pouvoir est concentré dans les mains d'un nouveau féodal prisonnier
lui-même d'une administration hors-sol. Le filet se resserre sur les maires
indépendants qui pensent et agissent différemment. Les subventions servent à
fidéliser ou à punir les uns ou les autres, et le parti dominant verrouille le
tout. Quant aux oppositions elles sont totalement marginalisées, car la gestion
tend à devenir consensuelle entre la gauche et la droite, un peu comme au
Parlement européen où, loin des électeurs, les forces politiques dominantes se
partagent les postes et les charges comme des fromages.
Voila pourquoi il est vital de mettre fin à cette fausse bonne idée du
regroupement dans des intercommunalités toujours plus grandes, toujours plus
opaques, toujours lus coûteuses, toujours plus politisées."