samedi 21 mai 2016

"France lève-toi et marche" de Nicolas Dupont-Aignan


Mois de mai aidant, j'ai profité des rares ponts de cette année pour reprendre le chemin de ma bibliothèque afin de continuer ma lecture de livres politiques. Et la reprise se fait en douceur avec un livre sorti récemment : "France lève-toi et marche" de Nicolas Dupont-Aignan (NDA).

Partisan du personnage, je ne m'attendais évidemment pas être déconcerté par cet ouvrage. Pour autant, celui-ci m'a permis de découvrir un peu plus l'homme politique et son action. Ce fut notamment le cas dans les premières pages où l'auteur nous expose son parcours, depuis son enfance à son départ de l'UMP en 2007 en passant par son élection comme maire de Yerres en 1995 et comme député de l'Essonne en 1997.
Si ces passages ne relèvent pas strictement de la politique, ils permettent toutefois de mieux cerner l'homme et de d'appréhender davantage son cheminement. Les paragraphes sur son action au niveau local, et en particulier comme maire, illustrent cela à merveille. Ravie à la gauche au 1er tour en 1995, Nicolas Dupont-Aignan est systématiquement réélu depuis avec des scores soviétiques, signe de confiance des habitants. Ayant pour slogan "la douceur de vivre", l'édile explique avoir pour volonté de développer l'implication de ses administrés dans la vie de la cité au travers d'une forte consultation (conseils quartier, référendums locaux). Enfin, certaines de ses réalisations à la tête de la ville sont évoquées : création d'un foyer pour femmes battues, financement de 50% du permis pour les jeunes en échange de travaux d'intérêt général, baisse de la délinquance, division par deux de la dette en 20 ans.

Outre ces aspects locaux, l'auteur insiste sur un point essentiel de son parcours, à savoir sa rupture avec l'UMP en 2007. Plus que l'évènement en tant que tel, celui-ci permet également de poser la question du combat de l'intérieur avec  la volonté de peser en interne et d'infléchir les décisions de l'appareil. Cette détermination à influer sur un parti en étant minoritaire est clairement illusoire comme nous pouvons le voir actuellement avec les frondeurs socialistes ou par le passé avec Arnaud Montebourg ou Jean-Pierre Chevènement. Remarquons d'ailleurs que Jean-Luc Mélenchon s'est lui résolu à quitter le PS pour pouvoir proposer une alternative. L'UMP et le PS sont aujourd'hui des machines de guerre au service du modèle dominant et qui ne sauraient tolérer les têtes qui dépassent.

En ce sens, gauche et droite se ressemblent et NDA renvoie gauche et droite dos à dos dans ce domaine comme dans bien d'autres. Tous deux ont accompagné main dans la main la montée en puissance d'une union européenne technocratique qui se fait sans les peuples, pour ne pas dire contre les peuples. Tous deux ont sacrifié notre souveraineté et notre pouvoir sur l'autel de l'europe (loi, monnaie, budget, frontières). Face à tout cela, mais aussi face aux conflits d'intérêts et aux accointances du monde politique et économique (autoroutes, fraude fiscale), nos concitoyens ne peuvent que se résigner et perdre confiance en leurs dirigeants, se réfugiant alors entre autres dans l'abstention.

Mais ce livre ne se résume pas à une série de constats. Il est également l'occasion d'aborder différents sujets tels que la crise agricole, les négociations en cours sur le TAFTA, la protection des lanceurs d'alerte, la crise des migrants.
Parmi ces thèmes, l'un a particulièrement attiré mon attention.  Il s'agit du chapitre consacré au retour en force des nations dans un monde multipolaire. Si Singapour ou l'Islande sont cités, la France est bien évidemment longuement évoquée. Le président de Debout la France (DLF) commence par détailler les atouts de notre pays (démographie, épargne, productivité, terroir, langue) puis en vient rapidement à un élément central de notre système politique : l’État. A l'heure actuelle, l’État en tant qu'institution est à la fois une force de par son existence et une faiblesse du fait de son affaiblissement. Et c'est justement contre cet affaiblissement que l'auteur veut lutter en faisant la promotion d'un Etat fort. Pour lui, et je le rejoins complètement sur ce point, cela passe par trois aspects : un état régalien (police, justice, armée), un état stratège (vision de long terme, planification) et un état providence. Contrairement à de nombreuses personnalités politiques, notamment à droite, Dupont-Aignan réaffirme clairement la nécessité d'un état social et solidaire tout en exprimant le souhait de lutter davantage contre l'assistanat, le gaspillage et la fraude (versement du RSA en échange de 7h de travail par semaine au service de la collectivité, suppression de l'Aide Médicale d’État (AME) parallèlement à l'ouverture de dispensaires, instauration d'un délai de carence pour l'attribution des aides sociales aux étrangers).

La dernière partie du livre est elle dédiée à l'exposition de différentes propositions, véritables prémices à un futur programme présidentiel. En voici quelques unes parmi beaucoup d'autres :
- introduction d'une dose de proportionnelle à l'Assemblée nationale
- réduction du nombre de parlementaires
- organisation de 5 référendums : justice, institutions, éducation, europe, immigration
- création d'un statut de l'élu
- financement direct de l’État par la banque de France
- division par deux de l'impôt sur les sociétés pour les bénéficies réinvestis en France
- affichage de la part du fabriqué en France afin de réorienter la consommation
- attribution des commandes publiques en priorité aux PME françaises
- mise en place de mesures protectionnistes visant au respect de nos normes par les importations
- développement de l'actionnariat salarié permettant l'association capital/travail chère au général de Gaulle

Pour en terminer avec ce livre, je souhaitais reproduire ici un passage sur l'intercommunalité (p 222-223). Alors que beaucoup, à droite comme à gauche, se jettent à corps perdu dans ce nouvel échelon administratif, j'ai toujours exprimé des réserves sur ces regroupements de communes. Et la création récente des métropoles avec toujours plus de compétences ne fait que renforcer mon scepticisme face à ces organisations gargantuesques. Comme j'aime à le dire, les métropoles sont l'union européenne du XXIème siècle : des regroupements à marche forcée avec une tendance à s'arroger toujours plus de compétences, en laissant parfois de côté le peuple. J'espère toutefois me tromper et surtout que nos intercommunalités n'atteindront pas le niveau de défiance et de contestation rencontrée actuellement par cette europe.


"Pour revivifier notre démocratie locale, il faut aussi changer de cap en matière de regroupement des communes. Une chose est de rassembler, pour faire des économies d'échelle entre plusieurs communes autour d'un besoin réel (écoles, piscine, bibliothèque); une autre est de créer des intercommunalités XXL qui dépossèdent complètement les élus, et donc leurs électeurs, de leur pouvoir de contrôle tant en matière de dépenses que d'impôts. Quand une communauté de communes regroupe, comme l'a décidé aujourd'hui la loi NOTRe, des dizaines de communes sur des territoires très étendus (trente à quarante kilomètres), le représentant du conseil municipal qui siège dans un conseil communautaire d'une centaine de membres ne pèse plus rien. Il n'ose plus ouvrir la bouche et, s'il l'ouvre, on lui cloue le bec.
Le pouvoir est concentré dans les mains d'un nouveau féodal prisonnier lui-même d'une administration hors-sol. Le filet se resserre sur les maires indépendants qui pensent et agissent différemment. Les subventions servent à fidéliser ou à punir les uns ou les autres, et le parti dominant verrouille le tout. Quant aux oppositions elles sont totalement marginalisées, car la gestion tend à devenir consensuelle entre la gauche et la droite, un peu comme au Parlement européen où, loin des électeurs, les forces politiques dominantes se partagent les postes et les charges comme des fromages.
Voila pourquoi il est vital de mettre fin à cette fausse bonne idée du regroupement dans des intercommunalités toujours plus grandes, toujours plus opaques, toujours lus coûteuses, toujours plus politisées."

dimanche 8 mai 2016

Nouveau maire de Londres : pourquoi tant de polémiques ?

Pont de l'ascension aidant, notre pays s'est quelque peu  ralenti ces derniers jours. En revanche, la polémique, elle, ne semble pas avoir pris de repos. Pire encore, lorsque nos contrées ne suffisent pas à nourrir la controverse, nos experts en la matière font preuve d'imagination en en important d'ailleurs.

Et c'est justement ce qui s'est produit suite à l'élection du nouveau maire de Londres. Récoltant 44% des voix, Sadiq Khan a remporté jeudi la capitale britannique face au candidat conservateur, Zac Goldsmith. Rien de bien intéressant a priori que cette élection municipale chez nos voisins anglais. En théorie non. Mais pas en pratique tant cette élection a fait couler de l'encre.

Qu'a-t-on souligné finalement dans cette affaire ?  La conquête de la ville de Londres par un travailliste après le double mandat du conservateur Boris Johnson ? La victoire du fils de chauffeur de bus face au fils de milliardaire ? Les propositions en matière de logement, de transports ou de pollution ? Rien de tout ça en réalité.
La principale chose, pour ne pas dire l'unique chose, qui a été mise en avant est la religion du nouveau maire. Et en l'occurrence son appartenance à la religion musulmane. Sadiq Khan n'a jamais caché sa religion mais ne l'a a priori pas revendiquée non plus. En tout cas, il ne semble pas l'avoir utilisée comme un argument électoral contrairement à ses adversaires. Il faut d'ailleurs noter que ce sont les médias français qui ont particulièrement mis l'accent sur la religion du candidat.


Le maire de Londres a bien le droit d'être musulman me direz-vous. Et je vous l'accorde bien volontiers. Pour être tout à fait honnête je me contrefiche de la religion de ce monsieur. Et c'est également le cas de la majorité des électeurs londoniens. Je trouve donc navrant que cet homme ait été systématiquement renvoyé à sa religion alors même que cela doit relever pour moi de la sphère privée. Pourquoi une telle différence de traitement avec d'autres candidats, si ce n'est pour lui porter préjudice ?

Ce traitement médiatique est toutefois révélateur et symptomatique de l'époque dans laquelle nous vivons. Plus que le programme et les idées, ce sont les identités des individus qui sont mises en avant. La tendance n'est plus au candidat socialiste ou libéral mais plutôt au candidat musulman ou gay. A l'ère du communautarisme ambiant, l'avènement de ces nouvelles étiquettes me semble préoccupant tant elles mettent à mal notre pacte républicain.
Encourager et entretenir ce phénomène comme le font certains médias ou forces politiques ne fera que donner du grain à moudre aux partisans de l'identitarisme. Ne leur facilitons pas la tâche en tendant le bâton pour se faire battre …