"Tu sais
quel jour on est ? On est le 8 mars. C'est ma journée !"
Voilà ce que la plupart
de mes congénères mâles ont entendu ce matin au réveil. Et bien désolé de vous décevoir mesdames mais
le 8 mars n'est pas VOTRE journée. Et non, il s'agit de la journée
internationale pour les droits des femmes. Ne vous attendez donc pas à un
bouquet de fleurs ou en tout cas pas plus qu'en temps normal.
Mais trêve de plaisanteries.
Enfin pas tout à fait en réalité. Regardons plutôt du côté de notre cher
président, lui qui est si réputé pour son humour potache. François Hollande a une
nouvelle fois prouvé son sens du timing en remettant vendredi dernier la légion
d'honneur à Mohammed ben Nayef ben Abdelaziz Al Saoud. Quel rapport me
direz-vous ? Et bien ce fameux monsieur Ben Nayef n'est ni plus ni moins que le
prince héritier d'Arabie Saoudite. Belle ironie donc que de décorer le prince
d'un régime sanguinaire, despotique et misogyne à quelques jours de la
célébration des droits des femmes.
Car, faut-il le
rappeler, l'égalité hommes-femmes est une utopie en ce pays et la discrimination
des femmes un mode de vie. La notion de "sexe faible" semble avoir
été inventée pour cet État du Moyen-Orient tant les libertés de la femme sont
restreintes : interdiction de conduire, prohibition de la mixité dans certains
lieux publics, obligation de porter une abaya (longue robe noire) et de couvrir
ses cheveux. Bref, les femmes (sur)vivent au quotidien sous domination
masculine.
Mais si la question du
droit des femmes ne suffisait pas, l'Arabie Saoudite est également un pays qui fait
preuve de largesses avec les droits de l'Homme. Liberté d'expression
inexistante, justice arbitraire, police religieuse omniprésente … Sans oublier évidemment la propension du
régime à exécuter à tour de bras (153 décapitations en 2015, 70 depuis le début
de l'année).
Vous l'aurez compris,
l'Arabie Saoudite n'est clairement pas un modèle de démocratie. Et pourtant
l'un de ses dirigeants a reçu la légion d'honneur des mains du président de la
République française. Troublant, non ? Et cela d'autant plus que notre
gouvernement fait preuve de nettement moins d'indulgence avec d'autres régimes du
même acabit, Syrie en tête. Pourquoi une telle différence de traitement,
pourquoi ce deux poids deux mesures si ce n'est pour des raisons purement
économiques ? "Business is business" comme dirait l'autre et la
realpolitik a pris aujourd'hui le pas en matière de politique étrangère.
Mais revenons-en au
thème de cette journée, à savoir les droits des femmes. Et il n'est pas besoin,
malheureusement, d'aller jusqu'en Arabie Saoudite pour voir poindre des
inégalités entre hommes et femmes. Notre pays, si évolué soit-il, est lui aussi
confronté à cette problématique que ce soit à l'école, en entreprise ou en
politique. Remarques machistes, différences de salaires ou de niveau de
responsabilités, discrimination à l'embauche … Le sexisme est finalement plus
répandu qu'on ne le pense et fait parfois partie du quotidien, au risque de se
banaliser. L'exemple le plus flagrant étant évidemment les blagues misogynes.
Alors que faire pour
rétablir une égalité réelle entre hommes et femmes. Certains grands penseurs
parmi nos dirigeants ont eu l'idée lumineuse de créer un secrétariat d'Etat
dédié. D'autres ont souhaité mettre en place des quotas, par exemple au travers
de loi parité de 2000. Nul ne peut prétendre avoir la solution miracle en ce
domaine mais indéniablement l'Etat et les institutions publiques doivent prendre
toute leur part dans l'évolution des mentalités par un travail de fond dès le
plus jeune âge. Car je suis persuadé que ces inégalités prennent naissance,
pour certaines, dans l'éducation. Et les nouvelles générations ont donc un rôle
à jouer en ce sens afin de déconstruire les stéréotypes et autres clichés sur
la gente féminine.
Rome ne s'est pas faite
en un jour. L'égalité hommes-femmes non plus. Les droits des femmes sont en
définitive une somme de conquêtes au fil du temps (droit de vote en 1944, loi
pour l'IVG en 1975, lois successives sur l'égalité professionnelle …). La leçon
à retenir est peut-être finalement que le combat n'est jamais réellement terminé
et que rien n'est totalement acquis. La vigilance est donc de mise pour aller
vers davantage d'égalité, vers toujours plus de droits et ne pas revenir à un quelconque
asservissement comme cela peut exister ailleurs. La France est la patrie des
droits de l'homme. Œuvrons pour qu'il soit aussi le pays des droits de la femme
!
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