mardi 8 mars 2016

Une légion d'honneur pour le droit des femmes

"Tu sais quel jour on est ? On est le 8 mars. C'est ma journée !"
Voilà ce que la plupart de mes congénères mâles ont entendu ce matin au réveil.  Et bien désolé de vous décevoir mesdames mais le 8 mars n'est pas VOTRE journée. Et non, il s'agit de la journée internationale pour les droits des femmes. Ne vous attendez donc pas à un bouquet de fleurs ou en tout cas pas plus qu'en temps normal.

Mais trêve de plaisanteries. Enfin pas tout à fait en réalité. Regardons plutôt du côté de notre cher président, lui qui est si réputé pour son humour potache. François Hollande a une nouvelle fois prouvé son sens du timing en remettant vendredi dernier la légion d'honneur à Mohammed ben Nayef ben Abdelaziz Al Saoud. Quel rapport me direz-vous ? Et bien ce fameux monsieur Ben Nayef n'est ni plus ni moins que le prince héritier d'Arabie Saoudite. Belle ironie donc que de décorer le prince d'un régime sanguinaire, despotique et misogyne à quelques jours de la célébration des droits des femmes.

Car, faut-il le rappeler, l'égalité hommes-femmes est une utopie en ce pays et la discrimination des femmes un mode de vie. La notion de "sexe faible" semble avoir été inventée pour cet État du Moyen-Orient tant les libertés de la femme sont restreintes : interdiction de conduire, prohibition de la mixité dans certains lieux publics, obligation de porter une abaya (longue robe noire) et de couvrir ses cheveux. Bref, les femmes (sur)vivent au quotidien sous domination masculine.
Mais si la question du droit des femmes ne suffisait pas, l'Arabie Saoudite est également un pays qui fait preuve de largesses avec les droits de l'Homme. Liberté d'expression inexistante, justice arbitraire, police religieuse omniprésente …  Sans oublier évidemment la propension du régime à exécuter à tour de bras (153 décapitations en 2015, 70 depuis le début de l'année).

Vous l'aurez compris, l'Arabie Saoudite n'est clairement pas un modèle de démocratie. Et pourtant l'un de ses dirigeants a reçu la légion d'honneur des mains du président de la République française. Troublant, non ? Et cela d'autant plus que notre gouvernement fait preuve de nettement moins d'indulgence avec d'autres régimes du même acabit, Syrie en tête. Pourquoi une telle différence de traitement, pourquoi ce deux poids deux mesures si ce n'est pour des raisons purement économiques ? "Business is business" comme dirait l'autre et la realpolitik a pris aujourd'hui le pas en matière de politique étrangère.

Mais revenons-en au thème de cette journée, à savoir les droits des femmes. Et il n'est pas besoin, malheureusement, d'aller jusqu'en Arabie Saoudite pour voir poindre des inégalités entre hommes et femmes. Notre pays, si évolué soit-il, est lui aussi confronté à cette problématique que ce soit à l'école, en entreprise ou en politique. Remarques machistes, différences de salaires ou de niveau de responsabilités, discrimination à l'embauche … Le sexisme est finalement plus répandu qu'on ne le pense et fait parfois partie du quotidien, au risque de se banaliser. L'exemple le plus flagrant étant évidemment les blagues misogynes.

Alors que faire pour rétablir une égalité réelle entre hommes et femmes. Certains grands penseurs parmi nos dirigeants ont eu l'idée lumineuse de créer un secrétariat d'Etat dédié. D'autres ont souhaité mettre en place des quotas, par exemple au travers de loi parité de 2000. Nul ne peut prétendre avoir la solution miracle en ce domaine mais indéniablement l'Etat et les institutions publiques doivent prendre toute leur part dans l'évolution des mentalités par un travail de fond dès le plus jeune âge. Car je suis persuadé que ces inégalités prennent naissance, pour certaines, dans l'éducation. Et les nouvelles générations ont donc un rôle à jouer en ce sens afin de déconstruire les stéréotypes et autres clichés sur la gente féminine.

Rome ne s'est pas faite en un jour. L'égalité hommes-femmes non plus. Les droits des femmes sont en définitive une somme de conquêtes au fil du temps (droit de vote en 1944, loi pour l'IVG en 1975, lois successives sur l'égalité professionnelle …). La leçon à retenir est peut-être finalement que le combat n'est jamais réellement terminé et que rien n'est totalement acquis. La vigilance est donc de mise pour aller vers davantage d'égalité, vers toujours plus de droits et ne pas revenir à un quelconque asservissement comme cela peut exister ailleurs. La France est la patrie des droits de l'homme. Œuvrons pour qu'il soit aussi le pays des droits de la femme !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire