"Messieurs les anglais, tirez les premiers !". Telle fut rapportée
par Voltaire la phrase vraisemblablement proférée par le comte d'Anterroches lors
de la bataille de Fontenoy le 11 mai 1745. Si le contexte et le prononcé même
de ces propos sont incertains, il est une chose qui est certaine depuis le 23
juin 2016 : les Britanniques sont les premiers à sortir de l'union européenne.
Alors bien
sûr certains diront que rien n'est encore fait et que le gouvernement n'a pas encore
officiellement invoqué l'article 50 du traité de Lisbonne, véritable clause de
retrait sous deux ans de l'organisation européenne. Il n'en reste pas moins que
le référendum souhaité par David Cameron, premier ministre du Royaume-Uni, a recueilli
51,89 % pour le Leave contre 48,11 %
pour le Remain, consacrant ainsi la
victoire du Brexit.
Anticipé ou non, souhaité ou redouté, ce
désormais célèbre Brexit a largement fait parler de lui bien au-delà des seules
frontières anglaises. Ce fut notamment le cas dans nos contrées où partisans et
opposants au Brexit se sont largement exprimés dans la presse. Deux citations
d'eurobéats con-vaincus m'ont particulièrement interpellé. Les voici :
"Le Brexit c'est la victoire des gens peu
formés sur les gens éduqués" – Alain Minc
"Pour éviter l'effet de contagion, il faut
que le départ soit douloureux" – Jean Quatremer
No comment comme diraient les
anglais. Ces propos sont toutefois malheureusement représentatifs du courant de
pensée dominant chez les élites bien pensantes qui nous gouvernement. Le peuple
ne sait pas ce qui est bon pour lui donc autant ne pas lui demander son avis.
Dans le cas contraire, et si par malchance la réponse à la question posée n'est
pas celle attendue, alors on peut toujours ignorer le scrutin (référendum de
2005 en France et aux Pays-Bas) ou contraindre le peuple à un nouveau vote
(référendum de 2001 et 2008 en Irlande). Une telle idée n'a d'ailleurs pas
manqué de faire surface au travers d'une pétition (potentiellement truquée)
quelques heures seulement après l'annonce des résultats. Cette europe a
décidément des soucis avec la démocratie.
Grave problème avec la démocratie
donc avec comme nous l'avons évoqué les précédents de référendums bafoués dans
différents pays. Mais problème également avec le respect de la souveraineté des
Etats et de leurs prérogatives. L'épisode grec avec le comportement on ne peut
plus impérialiste de la Troïka en est le parfait exemple. Mais quoi de plus
logique in fine que ces attaques contre la souveraineté dès lors que le projet
européen actuel est d'aboutir à la mort des états-nations au profit d'un
système fédéraliste. C'est du reste dans cet objectif que les souverainistes et
autres eurosceptiques sont grimés en vulgaires nationalistes populistes adeptes
du repli sur soi et assimilés à l'extrême-droite.
En ce sens la campagne de 2016 au
Royaume-Uni ressemble étrangement à celle
de 2005 en France. Outre les caricatures et les menaces, les promesses de chaos
se sont multipliées pour effrayer ceux qui seraient tentés de défier cette
europe totalitaire. Pour autant, dans un cas comme dans l'autre, rien de tout
cela ne s'est produit et aucune malédiction ou catastrophe en tout genre ne
s'est abattue sur le continent. Seuls les adeptes du système en place se sont
réveillés avec la gueule de bois pour notre plus grand plaisir.
L'histoire ne se répète pas
dit-on. Et pour autant les promesses en matière européenne se suivent et se
ressemblent. Que ce soit à droite ou à gauche, car ce débat transcende ces
clivages partisans, ce sont toujours les mêmes incantations qui reviennent : une
europe plus sociale, plus protectrice et plus démocratique. Voilà le triptyque qui est sans
cesse ressassé comme pour s'en convaincre soi-même … sans que cela soit
évidemment suivi d'effets.
Comment donc faire confiance à ces
responsables politiques qui, malgré les différents rejets populaires,
persistent dans l'erreur ? Alors que partout en europe les peuples refusent
cette fuite en avant vers toujours plus d'intégration et que ceux-ci
s'inquiètent de la dérive libérale et des cures d'austérité infligées, ces chers
(dans les deux sens du terme) dirigeants européens n'ont aucun scrupule à
ignorer et nier ces signaux invoquant le populisme à tout bout de champ. "Il ne peut y avoir de choix démocratique contre
les traités européen" disait Jean-Claude Juncker, le président de la commission européenne.
Tout un programme en forme de bras d'honneur fait à tous ceux qui défendent une
vraie alternative à cette europe supranationale qui se construit sans les
peuples, pour ne pas dire contre les peuples.
De par sa position centrale et du
fait de son Histoire, on pourrait s'attendre à ce que le sursaut vienne de la France
et que notre pays prenne la tête d'une coalition visant à impulser une nouvelle
dynamique autour des valeurs de démocratie et de souveraineté nationale. C'est
pourtant tout le contraire qui est en train de se produire sous la conduite de
François Hollande. Plutôt que d'aller à Londres pour évoquer l'avenir avec David
Cameron, notre président, décidément pas à la hauteur des enjeux, a préféré se
rendre à Berlin prendre ses ordres auprès d'Angela Merkel, bradant par la même
occasion le peu d'indépendance qu'il nous restait.
Bien malin serait celui qui
pourra prédire ce qu'il se passera dans les prochaines semaines et les
prochains mois. Il est en revanche certain que les dirigeants européens feront
leur maximum pour mener la vie dure aux Britanniques afin de dissuader les
autres candidats potentiels. De même, et malgré les avertissements multiples et
récurrents, il est clair que le système européen n'est pas prêt de changer. En
effet, ce grand démocrate et adepte de la fraude fiscale qu'est Juncker a
récemment indiqué que le CETA (le traité transatlantique - TAFTA - version Canada)
ne serait pas soumis à l'approbation des parlements nationaux.
La question européenne est aujourd'hui au cœur de l'actualité. A gauche
comme à droite, côté mondialistes/eurobéats comme côté
souverainistes/eurosceptiques, chacun avance ses pions. Nouveau traité,
référendum, Frexit … Quelle que soit la
solution proposée, il est indéniable que ce sujet sera un enjeu majeur de l'élection
présidentielle de 2017 suscitant des débats animés et passionnées comme en 1992
et 2005. Espérons seulement que l'issue en sera différente !
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