vendredi 29 mai 2015

Les dix ans d’une forfaiture démocratique

En ce vendredi 29 mai 2015, il me semblait important d'avoir une pensée pour feu le référendum sur le Traité Constitutionnel Européen (TCE). 
Dix ans après, il me semblait important de se rappeler du déni de démocratie de Nicolas Sarkozy avec la complicité de l'UMP et du PS.
Après l'adoption du traité de Lisbonne en 2008 par le Parlement, il me semblait important de rappeler qu'un tel passage en force était à nouveau en train de se produire avec le traité transatlantique de libre-échange (TAFTA).

Je pourrais disserter longuement sur le sujet et m'en suis d'ailleurs déjà expliqué à plusieurs reprises. Aussi, plutôt que de me répéter, j'ai préféré reproduire ici un texte de Laurent Herblay publié sur son blog.


En 2005, nous étions prêts de 55% des citoyens à nous être déplacés (en plus grand nombre que lors des dernières élections départementales ou européennes), pour refuser le traité constitutionnel européen. Mais trois ans après, les parlementaires violaient la parole populaire en ratifiant le traité de Lisbonne.

La démocratie bafouée et bâillonnée

Ce qui s’est passé depuis le 29 mai 2005 est grave. Bien sûr, d’un strict point de vue constitutionnel, cela était sans doute possible et ne violait peut-être pas les textes qui régissent notre organisation politique, encore que cela est sans doute plus que questionnable. Mais si le même scénario s’était produit ailleurs, qu’aurions-nous dit ? Imaginons un instant que Poutine ait perdu un référendum de la même façon, puis, que trois ans plus tard, il ait fait valider le même texte, à peine remanié pour vaguement donner le change, par les parlementaires. Serge July, qui avait littéralement insulté les Français qui avaient eu l’audace de ne pas suivre les lumières des penseurs correcto-maximo, n’aurait-il pas hurlé au fascisme, à la dictature, au viol inacceptable de la volonté populaire exprimée par référendum ?

Imagine-t-on le Général de Gaulle, après le référendum perdu d’avril 1969 revenir quelque temps plus tard avec un texte à peine remanié pour le faire passer par les parlementaires ? Il est bien évident que cette voie est une vraie forfaiture démocratique. A minima, nos dirigeants devaient proposer le nouveau texte, même à peine modifié, au suffrage populaire, comme le font l’Irlande ou le Danemark. Ce qui a été décidé par les citoyens ne doit pouvoir être défait que par eux. Ce faisant, PS, UMP, Centristes et écologistes ont trahi la démocratie en s’asseyant sur la volonté populaire pour adopter un texte similaire à celui refusé le 29 mai trois ans après. Cela est d’autant plus choquant que ce référendum avait provoqué un immense débat dans le pays, aboutissant à une très forte participation le jour du vote.

Ce que cela dit de l’Europe et de nos dirigeants

Mais cet épisode a au moins le mérite d’en dire long sur le projet européen actuel et nos dirigeants. Cette Europe refuse les non, comme on a pu le voir ailleurs, démontrant ses tendances totalitaires. C’est la nature même de son organisation qui pousse à cela. Dans cette organisation bureaucratique et centralisée, ses dirigeants ne veulent voir qu’une tête, uniforme. Donc ils préfèrent passer outre l’opinion citoyenne plutôt que de remettre en cause cette vision centralisée et uniformisatrice, qui n’est pas sans rien devoir à notre vision de l’État. Si l’Europe s’était organisée d’une manière souple et à géométrie variable, les pays pourraient facilement ne pas rejoindre un projet, chacun prendrait ce qu’il souhaite, tout en conservant la capacité de changer d’opinion. La démocratie serait respectée.

Mais dans un tel schéma, les États, et donc les peuples qui élisent leurs dirigeants, auraient gardé le pouvoir. Finalement, nos dirigeants, qui peuvent devenir des eurocrates, tel Pierre Moscovici, apprécient sans doute de couper le lien avec cette démocratie exigeante, qui impose de rendre des comptes et d’accepter la loi de la majorité. Ayant renoncé à penser, ils perdent aussi les réflexes démocratiques du débat contradictoire ou le fait d’accepter l’alternance. Voilà sans doute pourquoi, ils versent lentement mais sûrement vers une sorte de totalitarisme relativement doux, où les traités deviennent une cage, dorée pour certains, qui restreint sans cesse davantage la capacité d’action des dirigeants, et donc du peuple. Et parallèlement, le débat public tend à s’hystériser, tout en devenant de plus en plus superficiel.

 
Pour changer, il faudra sans doute balayer les partis qui se partagent le pouvoir depuis si longtemps, et qui ont perdu tout sens démocratique en ratifiant le traité de Lisbonne après le vote du 29 mai 2005. Bonne nouvelle : le vent du changement souffle déjà en Italie, en Grèce et en Espagne.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire