"100 000 emplois créés selon l’Insee pour
25 milliards d’aides aux entreprises. Ca fait quand même 250 000 euros par
emploi. C’est beaucoup".
Voila les propos tenus lundi
matin par Karine Berger (députée socialiste des Hautes-Alpes et chef de file de
la motion D) sur France Inter. Mais ce n'est pas tout. Elle ajoute également si
le chômage n'évolue pas positivement, c’est "d’abord
[la
faute] à une certaine partie du
patronat, ce n’est pas moi qui l’ai inventé, c’est monsieur Gattaz qui avait
mis à son veston un pin’s disant qu’il créerait 1 million d’emplois. En
pratique, d’après l’Insee qui a fait une évaluation du CICE et du pacte de
responsabilité en 2015, il n’y aurait que 100 000 emplois créés."
S'en rendre
compte maintenant c'est bien. Mais en avoir pris conscience avant ça aurait été
mieux ! Or cela fait des années, pour ne pas dire des décennies, que l'on
pratique la même politique d’exonérations de charges pour les entreprises. Pacte
de responsabilité et CICE pour Hollande, réduction dite Fillon pour Chirac …
Bref tous les gouvernements, de droite ou de gauche, y vont de leur petite
mesure en faveur des entreprises.
Et tout cela
pour quels résultats ? Bien peu en définitive. En tout cas presque aucun en
matière de lutte contre le chômage. En revanche, les impacts sont bel et bien
réels pour l'Etat qui voit son déficit se creuser de plus en plus chaque année.
A l'opposé, ce sont les entreprises qui bénéficient à plein de ces dispositifs.
Et au travers d'elles leurs actionnaires qui récupèrent une partie de ces
subventions par le biais des dividendes.
Cette fuite en avant vers toujours plus de cadeaux aux entreprises est une utopie coûteuse d'un point de vue financier et inefficace au niveau économique. D'une part, ces "aides" se concentrent sur les bas salaires (généralement jusqu'à 1,6 SMIC) ce qui n'incite pas les entreprises à augmenter leurs salariés. D'autre part, cela concerne toutes les entreprises dont celles de services (et en particulier les banques et la grande distribution) qui ne souffrent pas de problème de compétitivité ou de concurrence étrangère qui pourraient justifier une compensation de l'Etat. Par la mise en place aveugle de ces dispositifs non ciblés, le gouvernement entretient finalement une certaine précarité du marché de l'emploi, ce qui est à l'opposé de l'objectif initial.
Par
ailleurs, il me semble important de souligner que, bien évidemment, toutes ces
aides sont octroyées aux entreprises sans contreparties réelles et concrètes. Cela revient donc à arroser massivement ces
acteurs économiques sans engagement autre de leur part que de vulgaires
promesses d'embauches. Il est assez paradoxal pour ces grands patrons de
quémander l'aide de l'Etat alors même que ceux-ci sont de fervents défenseurs
du libre-échange et de la concurrence libre et non faussée. Encore un bel exemple
du "fais ce que je dis, pas ce que je fais".
Pour autant,
une telle inclination ne peut constituer l'alpha et l'oméga d'une politique
économique. Car sans consommation, ces mêmes entreprises se retrouvent sans
débouchés. Voila pourquoi c'est bien, in fine, la demande qu'il faut soutenir.
Et cela passe clairement par des aides directes aux ménages afin de doper la
consommation et donc la croissance.
Indéniablement,
cette politique de la demande ne peut être menée seule dans la mesure où elle
conduirait à un accroissement des importations. Celle-ci doit s'intégrer dans
une politique économique globale plus large dans le but de tenir compte de
l'ensemble de ces phénomènes. Cela suppose toutefois de s'interroger sur des
problématiques honnies et bannies du débat public aujourd'hui telles que la
fiscalité, le protectionnisme ou encore l'euro …
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