Comme j'aime à le dire, le savoir c'est le pouvoir et
la communication une manipulation.
Et l'actualité récente est
venue attester encore une fois de la pertinence de cette réflexion. Et par actualité
récente, je pense bien évidemment à la photo d'Aylan, cet enfant syrien retrouvé
mort sur une plage de Turquie.
Indéniablement cette
image a provoqué une forte vague d'émotion dans l'opinion publique. Chacun, et
c'est bien légitime, a pu être touché par ce tableau d'horreur. Comment ne pas
l'être d'ailleurs ? Et n'était-ce pas justement l'objectif ? N'y avait-il pas
derrière ce cliché une volonté de prise de conscience ? On peut évidemment le
penser.
Et cela a visiblement
bien fonctionné. Il a suffit d'une photo, d'une seule photo parmi tant d'autres
pour déclencher une mobilisation d'ampleur internationale. On voit bien là
toute la puissance de l'émotion et de la communication. Bien sûr que cet enfant
n'est pas la première victime, et probablement pas la dernière, d'une traversée
hasardeuse. Mais c'est l'une des rares fois où cette image de mort a été
diffusée si massivement. La crise des migrants avait maintenant un nom et un
visage, elle était personnifiée.
Tous les bons communicants
vous diront que l'incarnation, l'humanisation d'une problématique quelle qu'elle
soit est le meilleur moyen de créer un sentiment de proximité avec l'opinion
publique et donc de l'impliquer. Et c'est ce qu'a permis cette photo alors même
que cela fait des mois et des mois que des milliers de personnes (hommes,
femmes et enfants) se noient dans l'indifférence générale.
Mais ce désintérêt est
bel et bien terminé et il est tout à la fois triste et drôle de voir nos
dirigeants prendre enfin conscience de la problématique des migrants. Outre le
fait que ce phénomène n'est pas nouveau, il s'avère que ceux-ci ont activement contribué
à l'alimenter. Je pense notamment à leur action au niveau européen (espace
Schengen, traités prônant la libre circulation …) et international
(intervention militaire en Libye, faible action contre Daech). Car c'est
clairement la conjonction de ces deux facteurs qui a conduit à la situation
actuelle.
Aujourd'hui l'europe
doit donc faire face, sans y être vraiment préparée, à un afflux massif de
personnes arrivant pour beaucoup par la mer (iles grecques, Lampedusa …). Parmi ceux-ci une grande partie cherchent à
fuir des pays en guerre (Libye, Syrie) et sont donc potentiellement éligibles
au statut de réfugiés. Toute la problématique étant de savoir lesquels.
Car il est clair qu'il
n'existe pas UNE mais DES immigrations. Outre l'asile politique, on retrouve le
regroupement familial, les étudiants, la migration du travail ou économique. Chaque situation étant différente, un
traitement particulier doit y être appliqué.
Comme nous l'avons dit,
peu de pays sont préparés à accueillir ces migrants. Et cela conduit alors au
développement de bidonvilles comme à Calais et crée des situations difficiles,
à la fois pour ceux logeant dans ces camps de fortune et pour les habitants des
communes concernées. La question de la prise en charge de ces personnes doit
donc impérativement être posée et réfléchie afin d'éviter de nouveaux drames
humains.
Là encore l'émotion n'a
pas sa place et la réponse à apporter doit tenir compte de l'ensemble des
paramètres. Refuser tout asile politique comme le font certains me paraît être
une position difficilement tenable. De par son histoire et les valeurs qu'elle
porte, la France se doit de faire preuve d'humanisme et d'humanité en respectant
sa tradition de terre d'asile.
Ces principes étant
posés, il me semble toutefois nécessaire de réaffirmer la conditionnalité de ce
droit d'asile et de clarifier les règles permettant d'accéder au statut de
réfugié. Car aujourd'hui ce système a perdu en efficacité et est détourné de
son usage premier. En effet, d'une part le délai de traitement des demandes est
beaucoup trop long et d'autre part la plupart des personnes ayant vu leur
demande refusée restent sur le territoire national devenant alors des
clandestins. Cet état de fait doit donc être corrigé au plus vite en associant solidarité
et fermeté.
Mais faire preuve de
générosité en accueillant toujours plus de migrants n'est pas une fin en soi.
Car encore faut-il pouvoir proposer à ces personnes un accueil décent. Les
faibles réticences de l'Allemagne à l'arrivée de près de 800 000 migrants, pour
majorité des hommes jeunes (profil qui peut d'ailleurs prêter à interrogation),
n'est pas un hasard tant ce pays vieillissant à besoin d'un nouveau souffle en
termes de démographie et de main-d'œuvre. Tout l'inverse de la France donc qui
peine déjà fortement à fournir emplois et logements à ceux présents sur son
sol. Et quoi que l'on en dise, cette crise des migrants se révèle également être
une problématique économique pour les pays d'arrivée.
Lors de sa conférence
de presse d'hier François Hollande, suscitant l'ire de l'opposition, s'est
engagé à accueillir dans le cadre d'un plan européen environ 24 000 réfugiés
sur un total de 120 000. Les autres étant répartis principalement entre l'Allemagne
et l'Espagne. Si ce chiffre peut paraître modéré, celui-ci doit être utilisé
avec précaution tant il peut être l'arbre qui cache la forêt. En effet, et
alors même que le principe avait été rejeté quelques temps auparavant par le
gouvernement, le système de quotas par pays est une véritable escroquerie. Car,
en raison des règles de l'espace Schengen, rien n'empêchera les réfugiés "affectés"
à nos voisins de venir chez nous. Cette répartition est donc totalement fictive
et artificielle et n'est valable qu'au moment de la décision.
Alors que faire face à
cette situation ? Vaste question en réalité et bien malin serait celui qui
aurait une recette miracle. En Hongrie, le pouvoir en place a construit un mur
à la frontière avec la Serbie afin de contenir les arrivées. La mesure peut
évidemment être contestée mais il est navrant de la voir conspuer en Hongrie et
applaudie par les mêmes lorsque cela est fait chez nous à Calais à la frontière
anglaise. Deux poids, deux mesures …
Mais passons. Quelle
qu'en soit la cause, l'exode de migrants a des conséquences sur les pays de
départ (fuite des cerveaux …) et d'arrivée. Il parait donc être de bon sens que
de chercher à agir dans ces deux zones.
Pour grande partie les
migrants préfèreraient rester vivre dans leur pays plutôt que de se lancer dans
une expédition souvent dangereuse. Des actions doivent alors être menées dans
ces régions afin de stabiliser la situation tant au niveau économique que
politique. Concrètement, cela se traduit notamment par une intensification du
co-développement avec les pays d'Afrique. Et ce à destination des populations
et non des dirigeants (eau, éducation, agriculture …).
S'agissant des pays en
guerre, et en particulier la Syrie, la situation est plus complexe avec la
problématique du terrorisme. Et évidemment les interventions militaires
hasardeuses de ces dernières années n'ont rien arrangé. Bien au contraire.
Cette volonté très occidentale d'exporter notre système démocratique n'est
finalement qu'une illusion et la destitution de dictateurs par des forces
étrangères a conduit à déstabiliser les pays en question. Aussi imparfaits
qu'ils étaient, et c'est un euphémisme, les despotes avaient au moins le mérite
de maintenir une certaine stabilité qui n'existe plus aujourd'hui. Et le souhait
du président Hollande de faire tomber Assad s'inscrit dans la même lignée. Car c'est
la poursuite de ce dessein qui explique, entre autres, la croissance de Daech.
Dès le début, et sans pour autant cautionner et soutenir le président syrien,
une coalition internationale aurait dû intervenir militairement afin de tuer
dans l'œuf ce fameux état islamique. Au vu de la situation, notre attente a
trop duré et la France doit assumer ses responsabilités en s'engageant
pleinement contre Daech en Syrie.
Parallèlement à cela,
des mesures doivent être prises dans les pays d'arrivée. Et je pense que cela
doit être fait en concertation avec nos voisins européens qui sont in fine confrontés
aux mêmes problématiques. Sans rentrer trop dans le détail, nous devons lutter
contre tous ceux qui exploitent cette misère humaine (passeurs, marchands de
sommeil, patrons véreux …) en utilisant l'ensemble des moyens à notre
disposition. Par ailleurs, et comme mentionné précédemment, les règles
d'accueil doivent être réaffirmées de manière claire et non ambigüe avec des
critères précis et objectifs. Ce qui implique d'expulser ceux qui ne respectent
par ces règles ou qui ne remplissent par les conditions nécessaires. Enfin, des
efforts doivent être faits quant aux conditions de vie des migrants en attente
de traitement (création de centres d'accueil, démantèlement des campements sauvages
…).
La question des
migrants est évidemment une question sensible tant elle touche à la condition
humaine. Cela étant, cette problématique doit être traitée de manière sereine
et responsable en faisant abstraction de tout sentimentalisme. Humanité et
fermeté, tels devraient être les maitres-mots du gouvernement dans cette
affaire.
Comme vous le dites si bien en premier propos "la communication [est] une manipulation".
RépondreSupprimerDifficile de tenir un discours crédible après avoir discrédité son propre mode d'action.
Les journaux, censés apporter l'information, le savoir, ne sont ils pas des moyens de communication ?
On peut se demander, en lisant de tels propos, si vous n'êtes pas engagé politiquement... Je n'ai pas lu votre blog dans sa totalité mais j'ose espérer que, si mon hypothèse s'avère vraie, par un souci de transparence et de bonne information, vous l'avez mentionné. Ce savoir peut permettre au lecteur une meilleure analyse de vos écrits.
Bonjour,
RépondreSupprimerje maintiens effectivement que la communication est une manipulation. Terme qu'il ne faut d'ailleurs pas forcément prendre dans sons sens péjoratif mais également comme orientation d'un comportement. Par exemple, la publicité agit pour pousser le consommateur à acheter tel produit plutôt qu'un autre.
Les journaux sont bien des moyens de communication qui pour certains manipulent sciemment l'opinion publique en relayant certaines informations et en taisant d'autres. De même, les articles sont parfois orientés et subjectifs. Ce qui est d'ailleurs le propre de l'homme puisque nul ne peut-être parfaitement objectif.
Je ne sais pas ce que vous entendez exactement par "engagé politiquement" mais je n'ai jamais caché à mes lecteurs (et l'ai d'ailleurs explicitement écrit) mes proximités idéologiques avec certaines personnalités politiques et/ou partis.
Cela étant, ce blog n'est que l'expression de mes positions personnelles et non la vitrine de quelque appareil que ce soit. Mes écrits n'engagent que moi et reflètent ma pensée aussi fidèlement que possible.
Tomgu