vendredi 11 février 2011

Paroles, paroles de Français ...

Jeudi soir, 8,2 millions de téléspectateurs ont suivi l'intervention de Nicolas Sarkozy sur TF1. Le président de la République était invité pour répondre à un panel de Français dûment sélectionnés.
Si certains attendaient quelque chose de cette émission, je pense qu'ils ont été déçus. En effet, il ne s'agissait, ni plus ni moins, que d'une opération de communication visant à faire remonter le président dans les sondages.
 
Arrêtons-nous quelques instants sur la forme de cet entretien.
Personnellement, je ne suis pas fan de ce type d'émission dans la mesure où elle n'apporte que peu de choses et consiste uniquement en une tentative de réhabilitation d'un individu aux yeux de la population. En outre, on peut remarquer que les personnes invitées avaient beaucoup de mal à s'exprimer. Cela peut évidemment se comprendre mais cela ne facilite en rien l'échange, bien au contraire.
Concernant la prestation de Nicolas Sarkozy, j'ai trouvé le président égal à lui-même. Effectivement, ce dernier était plutôt agité, particulièrement dans la première partie. De plus, il a largement usé et abusé du "je" et du "moi" tout en jouant sur  les émotions (affaire Laëtitia) comme à son habitude.
Enfin, Nicolas Sarkozy a loué, voire même ciré les pompes, de tous les corps de métier et de toutes les professions qu'il a réussi à se mettre à dos. Je pense notamment aux magistrats, aux enseignants, aux forces de l'ordre, aux agriculteurs ...
 
Mais la forme n'est pas très intéressante tant elle est classique. Penchons-nous davantage sur les principaux éléments de fond abordés durant ces deux heures de dialogue.
L'un des thèmes abordés fut la Justice et notamment la grogne des magistrats. A cette occasion, Nicolas Sarkozy a confirmé ses propos : s'il y a eu faute, il y aura une sanction. Pour moi, il n'y a pas lieu de polémiquer puisque ce sentiment me paraît logique et justifié. En effet, je crois que les juges ne doivent pas être au dessus des lois et doivent pouvoir répondre de leurs actes afin de garantir une certaine égalité et équité dans notre système judiciaire. Néanmoins, il me semble nécessaire de renforcer les moyens de ce ministère qui sont aujourd'hui, malgré les augmentations de ces dernière années, encore insuffisantes pour faire face à la charge de travail croissante. Parallèlement, la volonté d'instaurer des jurys populaires dans les tribunaux correctionnels a été réaffirmée. Cette mesure ne me convainc pas forcément dans le sens où elle posera la question de son financement mais aussi de sa pertinence en lien avec la technicité des affaires jugées.
Autre sujet sensible de ces derniers jours : les excursions de Michèle Alliot-Marie et François Fillon dans des pays en proie à des troubles sociaux. La ligne de défense a visiblement été travaillée et n'a guère changé. Il a ainsi été avancé le fait que le contribuable n'a pas été mis à contribution. Cela est peut-être vrai mais je trouve que cet argument est insuffisant. De fait, on nous oppose des éléments matériels alors que l'on devrait se situer sur le plan de la morale et de l'éthique. Ainsi, le problème n'est pas tant le déplacement en tant que tel mais davantage le fait qu'il s'agisse de vacances dans un contexte tendu. Clairement, je crois que MAM aurait dû démissionner ou, à défaut, aurait dû être viré du gouvernement.
Le président a également abordé la question de la compétitivité de nos entreprises en nous comparant, une fois de plus, avec l'Allemagne qui semble être la panacée en Europe. Selon lui, les deux principaux problèmes à l'origine de notre retard sont les 35 heures et la fiscalité. Malheureusement, les choses ne sont pas si simples. Les délocalisations ne s'expliquent pas uniquement par des considérations fiscales et de temps de travail. Bien d'autres facteurs entrent en ligne de compte et notamment la concurrence à outrance ou le libre échange généralisé. En revanche, ces critiques sonnent comme une charge directe et peu dissimulée contre notre modèle social qui n'augure rien de bon pour les réformes à venir.
En outre, la problématique des moyens et des effectifs est revenue à de (très) nombreuses reprises au cours de la soirée. Qu'il s'agisse des forces de l'ordre, de la Justice ou de l'enseignement, le président considère que le problème n'est pas quantitatif mais qualitatif. En clair, il nous explique qu'il ne faut pas plus de policiers, de juges ou de profs mais au contraire qu'il en faut moins mais mieux formés et mieux payés. Bien que la question de la rémunération et de la formation se pose, il ne faut pas négliger l'aspect numérique. Effectivement, le manque d'effectif est aujourd'hui une réalité criante qui ne peut être mise de côté de manière arbitraire uniquement pour des raisons comptables. Je crois donc qu'il serait préférable d'inverser la tendance actuelle, qui consiste à dégraisser de manière drastique l'Etat, sous peine de le regretter fortement à moyen et long terme.
Pour finir, le débat s'est conclu sur le thème de l'université avec l'intervention d'un étudiant en histoire et en anglais. Nicolas Sarkozy a ainsi pu promouvoir l'autonomie des différents établissements français qui permettrait de meilleurs "performances" ou tout du moins de meilleurs résultats. Pour moi, les problèmes rencontrés par nos universités ne seront pas tous résolus par davantage d'autonomie. Selon moi, deux éléments expliquent, en partie, ces problèmes. Tout d'abord, je pense qu'il faut admettre que tout le monde ne peut pas aller à la fac. Je ne trouve donc pas aberrant d'instaurer une certaine sélection à l'entrée afin d'éviter d'accueillir tous les lycéens paumés qui n'ont aucune chance de réussite. Ensuite, il me semble impératif de faire un tri dans notre offre de formation. En effet, certaines filières sont actuellement bouchées en termes d'insertion professionnelle et d'autres ne mènent à rien de concret. Je crois donc qu'il faudrait pouvoir limiter le recrutement dans les "filières poubelles" tout en cherchant à professionnaliser les autres cursus afin de maximiser l'employabilité future des étudiants.
 
Au final, il apparaît que cette émission a été plutôt décevante. En effet, il n'a pas été possible d'approfondir suffisamment les différents thèmes abordés en raison, je pense, d'un trop grand nombre d'invités. Pour autant, je trouve que la prestation du président de la République a été assez convaincante en raison notamment de ses qualités oratoires. Je dois même dire que j'ai retrouvé là les qualités du candidat Sarkozy que sont sa force de persuasion, de conviction et de proposition. Malgré tout, je n'oublie pas, comme beaucoup de Français, que Nicolas Sarkozy est certes un beau parleur mais qu'il existe un fossé entre les paroles et les actes.

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