mardi 23 mars 2010

La droite se prend une gauche ...

C'est dimanche dernier qu'avait lieu le second tour des élections régionales 2010. Pourtant, suite à un premier round plutôt favorable à la gauche, les résultats devaient réserver peu de suspense. Et cela s'est effectivement vérifié.

Sans surprises donc, la coalition PS - Europe Écologie - Front de gauche finit largement en tête avec près de 55 %. La stratégie de rassemblement a donc bien fonctionné et confirme, une fois de plus, que l'union fait la force. Malgré tout, il apparaît que ces listes ont peu progressé par rapport au 14 mars ce qui sous-entend qu'elles n'ont pas réussi à mobiliser les électeurs.
Il faudra dorénavant suivre l'évolution de cette association tripartite lors des prochaines échéances car je crois que sa victoire n'est pas forcément liée à une adhésion mais plutôt à un vote sanction contre le pouvoir en place. En outre, la gauche et notamment le PS doit rapidement se mettre en ordre de marche pour 2012 car c'est lors de la présidentielle que se joueront vraiment les années à venir et que l'on verra si l'opposition est capable de proposer une réelle alternative et non une simple alternance.

Comme le laissaient présager les résultats du premier tour, la majorité est la grande perdante de ce scrutin. Malgré la conservation de l'Alsace et la prise de la Réunion et de la Guyane, il ne faut pas oublier que le Corse est tombée (ce qui n'était pas arrivé depuis 26 ans) et surtout que les scores réalisés sont vraiment faibles. Pour autant, il faut reconnaître une progression significative entre les deux tours grâce au retour aux urnes d'une partie des abstentionnistes.

Parler de ces résultats sans mentionner le succès du Front National serait une ineptie. Présent dans 12 régions sur 22, le FN réalise des scores importants et confirme la dynamique du premier tour. Les Le Pen père et fille rassemblent ainsi plus de 20 % des voix respectivement en région PACA et dans le Nord-Pas-de-Calais. Quant aux autres candidats, ils font plus de 10 %.
Pour beaucoup, le FN constitue la grande surprise de cette élection. Néanmoins, si l'on creuse un peu, on s'aperçoit que cela n'a rien de très étonnant. Depuis 2007, Nicolas Sarkozy a cherché à capter l'électorat frontiste en insistant sur les thèmes qui lui sont chers (immigration, sécurité ...). Mais cela n'a fonctionné qu'un temps et les électeurs sont rentrés au bercail. De plus, il apparaît clairement que le FN bénéficie des voix des couches populaires les plus touchées par la crise et notamment celles des ouvriers. Ceux-ci boudent ainsi les partis "traditionnels" qui ne répondent pas/plus à leurs attentes. Ils sont donc séduits par le discours du FN qui semble les prendre en considération et apporter des solutions à leurs préoccupations (emploi, pouvoir d'achat ...).
Le Front national réalisera toujours un score non négligeable car il jouit d'une base électorale fidèle. Ce score sera d'autant plus important que l'électorat populaire ne sera pas récupéré par la gauche.

Suite à ce cinglant échec, le pouvoir en place se devait de réagir. Et cela n'a pas tardé car un mini-remaniement a été annoncé hier soir. Pour moi, trois changements ne sont pas neutres. Tout d'abord, on remarque l'entrée de George Tron comme secrétaire à la fonction publique et celle de François Baroin au ministère du Budget. Ces nominations sont purement stratégiques. En effet, Baroin est un proche de Jacques Chirac et Tron de Dominique de Villepin. Or, on sait que les relations entre Chirac/Villepin et Sarkozy ne sont pas au beau fixe. Il s'agit donc ici d'apaiser les tensions entre les protagonistes mais également de savonner la planche de Villepin qui lorgne de plus en plus sur 2012. De plus, cela constitue une ouverture à droite visant à calmer les esprits dans les rangs de la majorité.
Ensuite, Eric Woerth passe du budget au ministère du travail et des relations sociales. La promotion de ce technicien avant la réforme des retraites à venir peut être vue comme un signe envers les syndicats mais peut aussi traduire une volonté de "se débarrasser d'un père la rigueur" en ces temps de tension budgétaire.
Enfin, la sortie du gouvernement de Xavier Darcos est assez surprenante tant on pensait ce sarkozyste dans les petits papiers du président. D'ailleurs, certains le voyaient déjà à Matignon. Plusieurs explications peuvent être avancées. Il peut s'agir d'un désaccord entre Darcos et Raymond Soubie (conseiller spécial de l'Elysée) qui a coûté sa place au premier. Mais le ministre est peut-être parti pour mieux revenir plus tard. Ou il est possible que la tête du ministre ait été offerte aux syndicats comme un cadeau d'apaisement. En fait, je ne sais pas trop mais il est plausible que ce soit un condensé de ces raisons.

Au final, ces élections n'auront pas conduit à de gros changements dans le paysage politique français. Les régions restent très majoritairement à gauche avec un exécutif composé du PS, des Verts et des communistes comme en 2004. Au niveau gouvernemental, rien ne semble indiquer une quelconque inflexion dans la politique menée par le gouvernement.
Reste maintenant à voir dans les prochains mois si un évènement majeur viendra bouleverser l'ordre établi et si l'opposition saura réellement prendre la mesure de son rôle de proposition. Aussi, comme disent nos voisins anglais : Wait and See !

2 commentaires:


  1. Personnellement je trouve que trois changements ministériels c'est plutôt léger... On pourrait croire que Nicolas Sarkozy ne veut pas entendre la réticence qu'ont les électeurs envers sa politique.
    Il feint le rassemblement à droite en nommant un Villepiniste et un Chiraquien mais ce n'est que de la poudre aux yeux, ce n'est pas ces trois petits changements qui prouvent d'une réelle volonté
    de recadrer sa politique.
    Concernant Xavier Darcos, sa mise à la porte est compréhensible comme suit. Il était au ministère des affaires sociales, le ministère qui aura en charge la réforme des retraites, or, Sarkozy ne
    peut pas se permettre de laisser à ce ministère quelqu'un qui s'est fait battre aux régionales et qui est donc politiquement affaibli.


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  2. De toute manière, il a clairement indiqué que, concernant sa politique, il conservait le cap. Le remaniement est purement politique et vise à géner De Villepin qui va créer son parti en vue de
    2012.
    Pour ce qui est de Darcos, il est clair qu'il s'est grillé, que ce soit à l'Education Nationale ou lors des régionales. Mais il paraîtrait que Sarkozy a prévu de grandes choses pour lui (Matignon
    ?). Son extraction aurait donc pour but de lui éviter de se mettre davantage à dos les syndicats au sujet de la réforme des retraites qui s'annonce casse-gueule, et ce quel que soit le ministre qui
    en sera en charge. En somme, peut-être une petite mise au vert avant de revenir sur le devant de la scène.


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