vendredi 16 septembre 2011

Premier débat pour les candidats à la primaire

S'il est un évènement politique que j'attendais avec une certaine impatience, c'est bien le débat des primaires socialistes. Et j'avoue ne pas avoir été déçu malgré quelques points perfectibles.
Mais commençons tout d'abord par la forme du programme. Celui-ci s'articulait en trois parties successives avec tout d'abord une brève présentation d'une minute par candidat. S'en suivait ensuite une interview par les journalistes durant dix minutes au cours de laquelle un grand nombre de propositions ont pu être développées. Enfin, un débat entre tous les participants s'est tenu pendant près d'une heure.
A priori un tel format semblait intéressant dans la mesure où cela permet à chacun de s'exprimer sur ses propres propositions avant d'être confronté à ses camarades. Malgré tout, il s'avère après coup que le débat à six a été relativement pauvre et aseptisé. Il aurait donc été préférable soit de rallonger les interviews soit de muscler davantage les échanges en explicitant un peu plus les points de divergence.
 
Passons maintenant à la minute de présentation de chacun des candidats.
- Martine Aubry : la maire de Lille a logiquement développé ses thèmes de campagne mais elle a surtout insisté sur son expérience ministérielle, notamment dans le but de contraster avec ses adversaires.
- Manuel Valls : celui-ci a fortement mis l'accent sur la dette et cela s'est vu tout au long de l'émission. Il s'agit, selon lui, de tenir un discours de vérité aux Français. Par ailleurs, ce dernier a alterné le "je" et le "vous" suivant la logique : vos problèmes, mes solutions.
- Arnaud Montebourg : le jeune député a accès sa présentation sur la crise et les réformes structurelles à mettre en oeuvre et a notamment expliqué sa volonté de fonder un nouveau système économique et financier. A noter également  le passage où il parle de sa famille et de ses origines qui tend à créer un sentiment de proximité en jouant sur l'affect des téléspectateurs.
- Jean-Michel Baylet : clairement ce candidat était le moins à l'aise de tous. Ce dernier était fébrile ce qui le forçait à lire son texte. Texte centré sur les valeurs républicaines défendues par les Radicaux.
- Ségolène Royal : une fois encore, la candidate de 2007 a mis en avant son expérience dans sa région. De plus, celle-ci a fait mention de son enfance, dans le même objectif que Montebourg mais avec moins de succès. Cela s'explique notamment par un cruel manque de spontanéité particulièrement renforcé par la lecture de ses notes.
- François Hollande : au delà du fond de son intervention, c'est surtout la forme qui m'a interpellée chez Hollande. En effet, celui-ci m'a paru crédible, convaincant et dynamique ce qui n'a pas été le cas de tous.
 
Après cette petite mise en bouche, les choses sérieuses ont commencé avec une interview de dix minutes dont trois (en théorie) sur un thème spécial choisi à l'avance par le candidat.
- Arnaud Montebourg : sur la forme, j'ai trouvé Montebourg clair et précis mais surtout incisif et tranchant. Sur le fond, celui-ci a insisté sur la nécessité d'une transformation en profondeur du système et non pour une simple gestion avec des changements à la marge. Cela passe notamment par une certaine dose de protectionnisme mais aussi par un affrontement avec le système financier avec la mise sous tutelle des banques.
Son thème spécial était le pouvoir d'achat avec trois propositions allant en ce sens : un partage des bénéfices entre salariés et actionnaires, un gel des loyers, le versement des allocations familiales dès le premier enfant et l'instauration de conditions de ressources.
- Jean-Michel Baylet : plus à l'aise que lors de sa présentation, le président du PRG a pu développer ses propositions qui se distinguent du projet du PS. Clairement celui-ci s'exprime pour une europe fédérale avec la mise en place d'une gouvernance politique et économique, dans le prolongement de la monnaie unique. Cela signifie donc plus d'intégration et de délégation de compétences donc moins de souveraineté nationale.
Son thème spécial était les sujets de société avec en particulier la légalisation du cannabis et la reconnaissance de l'euthanasie.
- Ségolène Royal : l'ancienne ministre de François Mitterrand a décliné son offre politique sans, je trouve, réelle hiérarchie entre ses propositions. On y retrouve alors la création d'une banque publique d'investissement, la promotion d'une croissance verte ou encore l'instauration d'une règle d'or dans la Constitution qui consisterait en une règle de bonne gestion des finances publiques.
Son thème spécial était les institutions dans la droite ligne de son contrat avec la nation. Et là j'ai retrouvé la Ségolène de 2007 avec ses slogans niais voire neuneu : "République du respect", "ordre social juste" ...
- François Hollande : Combattif, dynamique, vif, passionné sont les mots qui, pour moi, résument le mieux l'intervention de l'ancien premier secrétaire du PS. Fortement impliqué dans la lutte contre les déficits, ce dernier souhaite que chaque nouvelle mesure soit financée par des économies. Parmi celles-ci on retrouve le contrat de génération ou le recrutement de 60 000 enseignants. A noter que François Hollande a cité de nombreux chiffres, gagne de sérieux et de crédibilité.
Son thème spécial était le nucléaire et son souhait de la réduire de 75 à 50 % la part du nucléaire dans la production d'électricité.
- Manuel Valls : Valls l'a dit à plusieurs reprises durant la soirée, il veut tenir un discours de vérité aux Français. En clair, il ne veut pas promettre monts et merveilles et souhaite lutter de manière drastique contre la dette et les déficits. Il propose notamment d'instaurer une TVA sociale ce qui est assez surprenant pour un libéral comme lui dans la mesure où il s'agit d'une forme de protectionnisme.
Son thème spécial était l'intégration, l'immigration et la sécurité. Sa mesure phare est la mise en place de quotas migratoires par métier. C'est donc sur ce thème que Manuel Valls se distingue fortement des autres candidats.
- Martine Aubry : de même que François Hollande et Manuel Valls, Martine Aubry souhaite revenir à un déficit de 3 % en 2013, notamment par la suppression de niches fiscales inutiles. En parallèle, 300 000 emplois d'avenir, qui sont peu ou prou les emplois jeunes du temps de Jospin, seront créés.
Son thème spécial était le pouvoir d'achat. Celle-ci propose en particulier la tenue d'une conférence salariale dès le retour de la croissance (et avant on fait quoi ?) ainsi qu'un gel des loyers.
 
Dernière partie de l'émission, le débat entre tous les candidats.
Le décor choisi était un alignement des candidats debout devant un pupitre. Personnellement je ne suis pas fan d'un tel dispositif tant cela est solennel, ce qui était l'effet cherché. J'aurais privilégié une table ronde qui aurait permis de détendre un peu l'atmosphère en s'affranchissant du caractère cérémonieux.
S'agissant de la dette et des déficits, thème prépondérant de la soirée, il semblerait que deux tendances se dégagent : d'un côté les "keynésiens" avec une volonté de relancer l'économie et de l'autre les partisans de la rigueur et de l'austérité (notamment Valls, Hollande et Baylet) même si cela n'est pas exprimé de manière explicite. Dans la même veine, j'ai le sentiment que cohabitent dans ce parti les transformateurs (Montebourg et éventuellement Royal) et les gestionnaires qui accompagnent le système actuel.
Par ailleurs, il est clairement apparu que Martine Aubry a cherché à se démarquer de François Hollande (nucléaire, cumul des mandats, contrats de génération, déficits, emplois jeunes). Cela semble tout à fait logique puisque ce sont les deux leaders des sondages. Malgré tout, il est à noter que François Hollande a réalisé un bon coup sur la question du nucléaire en mettant ses camarades en difficulté alors que lui-même a un projet clair, net et précis.
 
Pour conclure, ce débat m'a paru assez intéressant, tant sur le fond que sur la forme. Alors bien sûr le débat final a été plutôt long à démarrer en raison des louanges, plus ou moins hypocrites, que les candidats s'adressaient chacun leur tour. Pour autant, l'interview centrale a permis de mieux cerner les différents protagonistes de la primaire :
- François Hollande : c'est la bonne surprise de la soirée pour moi. Ce dernier, que je ne connaissais que peu, m'a séduit sur la forme (dynamisme, volonté ...) même si je ne peux pas en dire autant sur le fond.
- Ségolène Royal : suite à son livre, et malgré son passif, je partais avec une opinion assez positive. Malheureusement je n'ai pas trouvé sa prestation à la hauteur. En outre, ses défauts de 2007 sont revenus au grand galop ce qui me déplaît fortement. En réalité, Royal m'énerve en particulier dans son intonation et ses slogans de bisounours mais aussi par l'usage à outrance du "je" et du "moi".
- Jean-Michel Baylet : pour moi Baylet n'est pas vraiment à sa place dans la primaire. Ce dernier n'a évidemment aucune chance et aurait du, si son intention est réelle, mener une candidature en parallèle. La seule raison pouvant expliquer sa présence est qu'en participant à la primaire, le PRG se rappelle au souvenir des socialistes afin d'obtenir un éventuel poste de ministre et surtout des circonscriptions pour les législatives.
- Arnaud Montebourg : dans la droite ligne de son livre, Montebourg défend des idées qui me parlent. De plus, ses qualités oratoires et son charisme viennent renforcer un peu plus ses possibilités de conviction.
- Manuel Valls : Valls m'est sympathique et j'apprécie certaines de ses prises de position. Malgré tout, je doute quelque peu de sa place au PS et le trouve un peu trop libéral à mon goût.
- Martine Aubry : A l'inverse de François Hollande, j'ai été déçu par la maire de Lille. Elle était ma préférée au début mais c'est de moins en moins vrai au fur et à mesure de ses prises de position.

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