lundi 30 janvier 2012

Ne zappez pas, le nouveau Sarkozy est là !

Hier soir, le président de la République s'est exprimé durant plus d'une heure dans le cadre d'une interview diffusée sur un nombre de chaînes ahurissant (TF1, FR2, iTélé, BFMTV …). Mais alors que penser alors de cet exercice de communication digne des plus grands monarques de la planète ?
 

Disons le tout de suite, pour évacuer les propos portant sur la forme, j'ai trouvé Nicolas Sarkozy convaincant et plutôt à l'aise dans cet exercice. Mais là n'est pas le plus important et la conclusion en est tout autre dès lors que l'on s'attarde quelque peu sur le fond, ce que je vais m'atteler à faire en m'intéressant aux mesures annoncées.
Commençons par le logement. Stigmatisant l'encadrement des loyers qui "n'a marché nulle part", Nicolas Sarkozy a proposé que "pour les 3 ans qui viennent, tout terrain, toute maison, tout immeuble verra ses possibilités de constructions augmentées de 30 %".
Si cette proposition peut être entendue, je ne crois pas à une généralisation de celle-ci car cela reviendrait à une application aveugle du principe sans tenir compte des spécificités locales. Par ailleurs, il ne s'agit là que d'une mesurette qui ne me paraît pas à la hauteur de la crise du logement que connaît notre pays. Il me semblerait alors plus pertinent de mettre en œuvre une politique de construction massive de nouveaux logements ce qui aurait, en outre, le mérite de développer le secteur du BTP donc de l'emploi.

Ensuite, le président a exprimé la volonté de créer une banque de l'industrie avec une dotation d'un milliard d'euros de fonds propres. Une fois de plus l'idée est louable mais elle reste petits-bras. En effet, et bien que je sois favorable à la création d'un pôle public d'investissement de type fonds souverain, je crois qu'il est impératif de faire preuve de plus de sévérité à l'égard des banques qui ne jouent plus le rôle qui devrait être le leur. Pourquoi alors que le constat est justement posé ne pas aller au bout de la logique ? Pourquoi ne pas contraindre les banques à financer l'économie réelle, c'est-à-dire à faire leur métier ?

S'agissant de l'emploi des jeunes, l'accent a été mis sur l'apprentissage avec le relèvement  du quota d'apprentis à 5 % (contre 4 % actuellement) et le doublement des sanctions à l'égard des entreprises ne jouant pas le jeu. Là encore je suis en accord avec cette proposition mais, une fois n'est pas coutume, cela n'est pas suffisant. L'apprentissage et l'alternance sont effectivement des dispositifs très intéressants et donc à développer mais pour autant ils ne peuvent être la seule réponse au chômage des jeunes. Car il ne faut pas oublier que l'apprentissage ne garantit pas un emploi à la sortie et que, de plus, il n'est pas possible dans toutes les formations.

Envisagée depuis longtemps mais refusée au plan européen, notamment du fait d'une opposition des Britanniques, Nicolas Sarkozy a annoncé l'instauration d'une taxe sur les transactions financières de 0,1 % sur les titres de toutes les entreprises cotées en France, même si l'achat est effectué à l'étranger. C'est une grosse surprise que cette initiative car depuis des années on nous sérine qu'une telle taxe ne peut être envisagée qu'à l'échelle européenne. Or on voit bien que lorsque la volonté politique existe les choses avancent. On ne peut maintenant que souhaiter que ce dispositif s'étende et se généralise par un phénomène de contagion.


Autre annonce faite hier soir et inspirée de modèle allemand, les accords sur le temps de travail. Concrètement, le temps de travail sera négocié entreprise par entreprise, signifiant alors la mort des 35 heures. A mon sens, il me semble nécessaire que l'Etat se mêle, dans une certaine mesure, de la vie des entreprises et cela d'autant plus en matière de droit du travail. Or avec cette mesure, les accords d'entreprises s'imposeront à la loi, comme le souhaite François Hollande d'ailleurs. On peut alors craindre, du fait même du principe de négociations, d'aboutir à un système inégalitaire avec une issue défavorable pour les salariés tant le rapport de force avec le patronat est déséquilibré. En outre, cela pose également la question du déclenchement des heures supplémentaires. Car rappelons qu'aujourd'hui rien n'interdit de dépasser 35 heures par semaine dès lors que les heures effectuées en plus sont majorées.


Enfin, et c'est probablement la principale déclaration, Nicolas Sarkozy s'est prononcé en faveur de l'instauration d'une TVA sociale (bien qu'il en réfute le nom). En somme, la TVA va augmenter de 1,6 point à 21,2% et la CSG sur les revenus financiers de 2 points pour baisser les charges patronales.
Il serait malhonnête de ma part de condamner cette mesure alors que j'en suis partisan. Pour autant, le terme de "TVA sociale" recouvre un grand nombre de réalités. Et la mienne et différente de celle du président. Personnellement, et je me suis exprimé à plusieurs reprises sur le sujet, je crois qu'il est nécessaire d'agir sur les cotisations patronales et salariales, ce qui n'est évidemment pas le cas ici.

Au final, et à trois mois d'une élection capitale, Nicolas Sarkozy cherche à sauver la face en multipliant les annonces. Cela est toutefois surprenant dans la mesure où ces réformes auraient pu être mises en œuvre durant le quinquennat. Comportement étrange donc que cette fuite en avant. Enfin étrange, pas vraiment puisqu'il s'agit là d'une étape s'inscrivant dans un plan de bataille plus large en vue de la présidentielle. Car, que Nicolas Sarkozy soit candidat à sa réélection ou qu'il prépare la place pour un autre, cet énième entretien n'est qu'un nouvel enfumage, une nouvelle diversion visant à noyer le poisson d'un mandat raté.

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