lundi 23 décembre 2024

Bayrou ou la mise en œuvre du slogan de la Maaf !

Je le serai un jour, je le serai !
Telle pourrait être l’adaptation du slogan de les assurances Maaf pour notre nouveau premier ministre François Bayrou. 


Car il aura en effet fallu faire preuve de patience au plus célèbre des Béarnais pour enfin obtenir le graal. Certes pas celui dont il rêvait (la présidence de la République) mais un poste de premier plan malgré tout. 


Une prouesse somme toute inespérée tant Bayrou revient de loin. Qui plus est lorsque l’on sait que le poste a failli une fois de plus lui passer sous le nez au profit, selon les rumeurs, de Sébastien Lecornu. 


Mais le tout n’est pas d’être nommé. Encore faut-il exercer le pouvoir, former un gouvernement et plus encore assurer son maintien en poste. Et rien n’est encore fait. 


Première étape franchie aujourd’hui avec l’annonce de la composition du gouvernement en ce 23 décembre. Si j’avais quelques espoirs quant au gouvernement Barnier, en raison notamment de la qualité du premier ministre, force est de reconnaître  que ce n’est pas le cas pour celui de son successeur. Outre le fait que je n’ai que peu d’accointances avec Bayrou, il apparaît que la brochette de ministres de ce nouveau gouvernement ne fait clairement pas rêver. Beaucoup (trop) de revenants, qui pour la plupart ont échoués à la tâche, pour espérer un réel changement. Bref, une classique continuité qui s’inscrit parfaitement dans la philosophie du « en même temps ». 


Et pourtant, pouvait-il en être autrement ? Assurément non. D’une part, en raison du contexte politique actuel qui incite à rechercher un large consensus afin d’éviter la censure. D’autre part, du fait même de la personnalité du premier ministre, incarnation sans faille d’un centrisme européiste vieillissant. 


Quoi qu’il en soit, il faudra faire avec cette équipe gouvernementale, a minima pour les prochaines semaines. Sauf surprise, sa durée de vie devrait être sensiblement identique à celle du gouvernement Barnier. Voire inférieure tant les débuts du premier ministre ont été maladroits, voire houleux : conseil municipal à Pau, polémique sur le cumul des mandats …


Souhaiter un échec de François Bayrou et son gouvernement n’est toutefois pas une solution tant la situation est déjà critique. Il faut au contraire espérer qu’un budget soit adopté le plus rapidement possible et que celui-ci soit le moins fiscalement douloureux. Ce qui n’est déjà pas gagné …

mercredi 4 décembre 2024

Ci-gît le gouvernement Barnier

5 septembre 2024 – 4 décembre 2024
Telle sera la date apposée sur la tombe du gouvernement Barnier suite au vote de la censure par une majorité de députés en fin de journée. Presque 3 mois au pouvoir pour un premier ministre si difficile à trouver. A moins que cela ne soit pire pour le prochain.

Les avis sont tranchés quant au sort de Michel Barnier et de ses ministres. Certains exultent et n’attendaient que cela, d’autres regrettent le gâchis et s’inquiètent de la suite des événements. Je dois avouer me ranger dans la seconde catégorie car ce premier ministre n’était pas pour me déplaire. Évidemment tout n’était pas parfait, bien sûr que certains membres du gouvernement n’étaient pas ma tasse de thé mais au vu des circonstances, cela aurait pu être (bien) pire. Sans parler naturellement de l’hypothèse d'un gouvernement LFI/NFP.

Le gouvernement est donc tombé suite au recours à l’article 49-3 sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et au dépôt de deux motions de censure portées par le NFP et le RN. Seule la première a toutefois été votée puisque la majorité aura été atteinte. Il est toutefois probable que la seconde ne l'aurait pas été dans la mesure où les députés de gauche ne souhaitaient pas mêler leur voix à celles de leurs collègues du RN. Vaste hypocrisie puisque l’addition de l’ensemble des voix de ces groupes était nécessaire pour espérer obtenir une majorité.
C’est d’ailleurs la décision de Marine Le Pen et ses équipes de voter la censure qui a conduit à cette situation. Voilà pourquoi il a régulièrement été question que le RN avait pouvoir de vie ou de mort sur ce gouvernement et surtout pourquoi Michel Barnier s’est évertué à satisfaire autant que possible aux demandes du premier groupe de députés à l’Assemblée nationale.

Ce PLFSS n’est finalement qu’un prétexte et ne constitue pas en réalité l’enjeu des débats. Ceux-ci dépassent largement ce seul sujet et, allons même plus loin, la thématique du budget 2025. Là encore je reconnais que ce budget n’était pas à la hauteur avec trop de hausses d’impôts et pas assez de baisses de dépenses, notamment structurelles autour du fonctionnement de l’État et des organisations, opérateurs et autres agences en tout genre qui, comme dirait l’autre, coûtent un pognon de dingue. Mais n’oublions pas les circonstances, à la fois temporelles, politiques et économiques, dans lequel ce budget a été élaboré. L’idée n’est pas de chercher de quelconques excuses mais de sortir d’une simple logique d’affrontements stériles.

Quoi qu’il en soit, la messe est dite et finalement peu importe les motivations de vote de chacun (empêtrement juridique, batailles d’egos, désaccords de fonds …). Emmanuel Macron doit maintenant se mettre en quête d’un nouveau premier ministre dont la tâche ne sera d’ailleurs pas plus aisée que celle de son prédécesseur. Car in fine rien n’aura changé en termes d’équilibres politiques et donc de majorité puisqu’aucune dissolution n’est possible à ce stade. On prend donc les mêmes et on recommence.

L’autre alternative envisageable mais déjà écartée par le principal intéressé consiste en la démission du président de la République. Si cela était vraiment le cas, on pourrait considérer que la boucle serait bouclée puisque finalement tout ce capharnaüm n’est que la conséquence de la dissolution décidée par Emmanuel Macron en juin dernier. Pour autant, je crois que cela ne ferait qu’ajouter du chaos au chaos en exacerbant des tensions et divisions déjà vives dans la population et le pays.

Les prochains jours et prochaines semaines n’augurent alors rien de bon et il n’est pas certain que la traditionnelle trêve des confiseurs vienne apaiser les esprits. Il serait pourtant préférable que nos dirigeants s’inspirent des valeurs de noël afin de sortir notre pays du bourbier dans lequel il se trouve.

samedi 19 octobre 2024

Et si on recréait la taxe d’habitation ?

L’examen du projet de loi de finances 2025 a donc commencé ces derniers jours à l’Assemblée nationale. Et je dois reconnaître être quelque peu consterné par ce qui s’y passe actuellement. Nos chers députés, en particulier côté NFP, rivalisent d’ingéniosité pour nous assommer de taxes en tout genre. Chacun y va ainsi, y compris en provenance du Mouvement Démocrate, de son amendement visant à accroître la pression fiscale alors même que notre pays connaît déjà un niveau de prélèvement obligatoire très (trop ?) élevé atteignant 43,2% du PIB en 2023.

Difficile de croire alors que l’on vive dans le même monde que ces gens-là, eux qui évoluent sous les ors de la République grâce à nos impôts justement (peut-être une piste d’économie d’ailleurs). Rien n’est évidemment définitif pour le moment et il faudra attendre le vote en séance plénière pour être fixé. Il semblerait pourtant que le volet réduction des dépenses, si ce n’est sur les aspects liés à la sécurité sociale par exemple, soit peu fourni. Mais cela est-il tant étonnant de la part de ceux qui bénéficient à plein de l’argent public ? Sans tomber dans un discours purement démagogique, peut-être faudrait-il revoir à la baisse le budget de nos dirigeants (Élysée, Matignon, Parlement …) tout en sabrant allègrement dans le nombre de conseils, comités et autres organismes étatiques en tout genre dont l’utilité est pour le moins contestable. 


Mais laissons pour l’heure de côté les questions de réduction des dépenses pour revenir au sujet du jour, à savoir la réhabilitation de la taxe d’habitation. Si le retour de ce dispositif supprimé par Emmanuel Macron à partir de 2018 pourrait paraître contradictoire avec ma critique de la recrudescence de la pression fiscale, il n’en est rien. En effet, rappelons-nous que cette suppression annoncée comme un gain de pouvoir d’achat n’est en réalité qu’une vaste supercherie qui a permis certes un gain pour les locataires mais a surtout représenté une véritable gifle fiscale pour les propriétaires du fait de la hausse massive de la taxe foncière, en particulier par les communes (sans compter les effets néfastes de l’inflation sur la revalorisation des bases). Ce qui a été donné de la main gauche a donc été récupéré rapidement et plus amplement par la main droite. 


Plus encore, au delà de la pénalisation financière des propriétaires, il s’avère que cette réforme présente un problème de fond d’après moi dans la mesure où elle conduit à couper le lien entre l’habitant et le territoire sur lequel il réside. De fait, cela revient à faire supporter le fonctionnement des services et infrastructures locaux aux seuls propriétaires sans participation de ceux qui in fine en profitent le plus, c’est à dire les habitants de la commune en question. 


L’idée serait donc bien de revenir à une logique de financement par l’usager, ou tout du moins en partie afin d’une part de recréer ce lien avec le lieu d’habitation et d’autre part de davantage les responsabiliser en les associant au développement de leur ville. En ce sens, cela s’inscrit dans la même logique pour moi que le fait que chacun devrait payer un impôt sur le revenu à la hauteur de ses moyens. 


Faut-il alors revenir sur les mêmes mécanismes qu’auparavant ou développer un nouveau dispositif ? Je dois reconnaître ne pas avoir de réponse toute faite sur le sujet et la question mérite d’être étudiée de manière plus approfondie par des experts en fiscalité. Ce que je crois en revanche c’est que la charge fiscale doit être répartie entre celui qui possède le bien et celui qui y habite car tous deux bénéficient de manière plus ou moins directe des services et infrastructures de la commune. 

Et outre une logique d’équité et de justice fiscale, cette réforme permettrait d’alléger une partie des nombreuses contraintes (DPE, taxe foncière, impayés …) pesant sur les propriétaires bailleurs. 


Car sur ce sujet comme sur d’autres, à trop décourager l’investisseur et le propriétaire bailleur, notamment issu des classes moyennes, ce sont les plus précaires d’entre nous qui en paieront le prix par effet collatéral. 

mercredi 2 octobre 2024

Habemus gouvernementam !

Si le choix d’un premier ministre a été long et éprouvant, la constitution du gouvernement n’a pas pour autant été de tout repos. Et c’est finalement le 21 septembre que la tant attendue fumée blanche est apparue, 16 jours après la nomination de Michel Barnier à Matignon.

Ceux qui ne s’attendaient à rien n’auront pas été déçus, quant aux autres … Mais laissons sa chance au produit comme dirait l’autre. Car même si peu de ministres semblent sortir du lot, reconnaissons que l’équilibre n’était pas aisé à trouver au vu de toutes les contraintes et injonctions contradictoires. Pour autant Michel Barnier a pour l’heure réussi l’exercice réunissant certes un grand nombre de personnalités inconnues du grand public mais également quelques poids lourds (actuels ou anciens) de la vie politique française (Bruno Retailleau et Didier Migaud notamment), sans compter des membres des gouvernements sortants.

Bien évidemment, nos chers amis du Nouveau Front Populaire ont eu beau jeu de crier au scandale. Posture somme toute attendue dans la continuité des précédentes prises de position qui s’est d’ailleurs prolongée hier suite au discours de politique générale de Michel Barnier. Plus encore, le comportement de certains députés, notamment LFI, me parait tout à la fois puéril, déplacé et irresponsable. Si cela s’inscrit dans la droite lignée de la précédente mandature, il n’en reste pas moins que cela ne grandit pas notre classe politique et ne tend pas à rassurer sur la capacité à gouverner de certains.

Toute cette esbroufe était-elle au final nécessaire au vu du discours du premier ministre ? Assurément non d’après moi. Clairement Michel Barnier n’a pas renversé la table ni promis le grand soir mais cela n’est pas le genre de la maison. Il a malgré tout réussi, je crois, à s’inscrire dans une certaine continuité programmatique tout en y mettant sa patte et en donnant des gages à gauche et à droite. Augmentation du SMIC et mise à contribution des grandes entreprises et des plus fortunés d’une part, maitrise de l’immigration et simplification administrative d’autre part en passant par une réflexion sur le scrutin proportionnel et la politique du logement.

En somme, et à première vue, de quoi satisfaire largement et s’attirer les bonnes grâces au-delà de son propre camp. Toutefois, tout ceci ne relève pour l’heure que du domaine des paroles et l’épée de Damoclès de la censure continue toujours de planer au-dessus des têtes du nouveau gouvernement. Seuls des actes forts et une réelle démarcation avec le début du quinquennat permettront d’assurer une relative longévité à l’équipe en place.
Wait and see comme disent nos amis anglais.  

 

vendredi 6 septembre 2024

Michel Barnier à Matignon : tout ça pour ça ?

Il fut un temps où TF1 diffusait une saga de l’été, téléfilm à suspense en plusieurs épisodes. Si la tradition semblait révolue, Emmanuel Macron prit visiblement le parti de la ressusciter en 2024. On retrouve dans les deux cas les mêmes ingrédients : casting XXL, rebondissements à foison … Mais le dénouement de l’histoire était nettement meilleur sur la première chaine privée d’Europe.

Tout commença par des élections européennes en juin 2024. Élections dont chacun connait l’issue et qui débouchèrent sur une dissolution de l’Assemblée nationale suivie d'élections législatives. Alors même que le président appelait à un moment de clarification, ces dernières semaines n’ont finalement été qu’un énorme maelstrom qui n’auront fait qu’éloigner, comme s’il le fallait encore, la base de nos élites.

Près de deux mois auront donc été nécessaires pour aboutir enfin à la nomination d’un premier ministre. Deux mois laborieux au cours desquels notre pseudo maitre des horloges a prêché le vrai et le faux, distillant çà et là des noms parfois plus surprenants les uns que les autres. De (trop) nombreuses semaines qui auront mis le pays sous tension et jeté le discrédit sur notre classe politique, le président au premier chef. Faut-il pour autant parler de dictature, de déni démocratique et autres accusations de totalitarisme ? Assurément non, sauf à se vautrer dans une posture politique comme le fait allègrement une partie de la gauche.

Cela étant, nous avons donc dorénavant un premier ministre en la personne de Michel Barnier. Formidable contraste toutefois entre la modernité, au moins dans la forme, de Gabriel Attal et le classicisme de Michel Barnier. Point positif de l’histoire, le républicain de 73 ans a au moins le mérite de l’expérience, de la connaissance des institutions et possède une stature internationale. Existait-il un meilleur candidat ? Possiblement mais celui-ci n’est pas pour autant le pire, loin s’en faut. Reste à voir maintenant la politique qui sera menée et surtout les marges de manœuvre dont disposera le premier ministre, sans parler de sa durée de vie évidemment.

Mais après tant de suspense, pourquoi sent-on poindre alors un sentiment de déception ? Ne serait-ce pas finalement parce que la montagne a accouché d’une souris ? Tant de palabres et temps perdu pour ressortir in fine une carte maintes fois jouée. Gageons toutefois que nous ne sommes pas au bout de nos (mauvaises) surprises avec la nomination prochaine, enfin on l’espère, des différents membres du gouvernement.

mardi 9 juillet 2024

Législatives 2024 : tous gagnants, tous perdants ?

Reprendre le clavier avec assiduité n’aura finalement été qu’un vœu pieu qui n’aura que peu duré, à l’instar des bonnes résolutions de début d’année. Et pourtant ces dernières semaines ont été riches d’un point de vue politique, les européennes conduisant à une dissolution suivie d’élections législatives. Et tout cela n’est pas encore fini dans l’attente d’un nouveau gouvernement. Le meilleur ou le pire étant à venir …

Tout était pourtant parti d’un banal scrutin européen dont l’issue fut un résultat somme toute sans surprise avec une large victoire de la liste Rassemblement National conduite par Jordan Bardella. Jusque-là tout va bien comme dirait l’autre. Et les choses auraient pu continuer ainsi. Mais c’était sans compter sur la réaction clairement inattendue de notre cher président. Bien malin en effet celui qui aurait pu prédire cette dissolution sortie de nul part. Le camp présidentiel avait certes connu une importante défaite mais celle-ci était annoncée de longue date, pour ne pas dire attendue dans une élection de mi-mandat qui sont généralement peu favorables au pouvoir en place. Chacun aurait pu donc continuer son petit bonhomme de chemin comme si de rien n’était.

Emmanuel Macron en a pourtant décidé autrement. Sans finalement que l’on sache avec certitude ce qui lui est passé par la tête : souhait de rebattre les cartes ou de reprendre la main, volonté de laisser une trace dans l’histoire, tentative de savonner la planche du RN en lui donnant les clés du camion … Peu importe en réalité puisque de nouvelles législatives ont été organisées les 30 juin et 7 juillet avec les résultats que l’on sait.

Et quels résultats in fine ! Alors même que le RN était largement en tête au 1er tour, de manière assez cohérente avec leur score aux européennes, nous avons pu assister à une sorte de remontada (euro de football oblige) de la part des forces du bien épargnant ainsi à notre pays le péril fasciste. Plus sérieusement, les résultats du second tour ont clairement secoué dans les chaumières avec dans l’ordre en nombre de sièges : NFP (Nouveau Front Populaire), majorité présidentielle et RN. Où l’on voit ici l’impact fondamental des désistements suite au premier tour, des appels au « front républicain » et de l’incidence de notre mode de scrutin à deux tours. Les uns y voyant des avantages qui sonnent comme des inconvénients pour les autres.

Sur cette distorsion d’angle de vue justement, il est d’ailleurs intéressant de voir à quel point un même évènement peut être interprété et analysé de manière différente voire même opposée selon le prisme du narrateur. Ainsi qu’il s’agisse de l’alliance de la gauche, des compères macronistes ou des amis de Bardella et Ciotti, tous sont jugés au choix comme ayant progressé, limité la casse ou reflué.
Qui croire alors ? Vaste débat tant la conclusion dépend tout à la fois de celui qui parle et de la base de comparaison. Mais il faut surtout s’attarder une seconde sur les éléments qui sont mis en regard. Nous évoquions précédemment que le NFP était arrivé premier en termes de sièges (184) suivi de la majorité présidentielle (166) puis du RN et alliés (143). C’est factuellement vrai comme le montre l’infographie ci-dessous. Cela étant, en y regardant de plus près, on peut remarquer que l’on compare une coalition dans les deux premiers cas à un seul parti pour le troisième. Si l’on regarde donc le nombre de sièges par parti on se rend alors compte que le RN est en réalité le vainqueur de cette élection. De même lorsque l’on s’attache aux résultats en nombre de voix (2ème infographie). Et idem en termes de progression du nombre de députés.

Comment donc expliquer un tel écart entre ces chiffres issus du ministère de l’Intérieur et les commentaires qui en sont faits ? Si on laisse de côté les potentielles volontés de manipulation/désinformation, il me semble que deux phénomènes sont à prendre en compte.
D’une part les blocs de gauche et du centre sont considérés comme des ensembles homogènes et indissociables, comme un tout. Or ce n’est évidemment pas le cas ou en tout cas ne le sera probablement pas longtemps tant des divergences de fond et de forme importantes existent entre chaque composante, en particulier du côté du Nouveau Front Populaire.
D’autre part, les résultats de chaque pôle sont très souvent, voire systématiquement mis en perspective par rapport aux résultats attendus/projetés, aux sondages d’avant vote. En conséquence, vu sous cet angle, les scores du RN se résument en effet à une défaite et ceux de ses concurrents à des victoires inespérées. Ce phénomène est d’autant plus prégnant en raison de la physionomie du premier tour et des européennes ainsi que du climat de peur et de tension créé autour de la possibilité pour le Rassemblement National d’obtenir une majorité absolue. D’ailleurs que celui qui n’a pas entendu le mot soulagement dans son entourage lundi me lance la première pierre.

Mais au-delà de tous les commentaires et autres opinions, il n’en reste pas moins que les mois à venir risquent d’être compliqués avec une assemblée dans laquelle trois blocs s’opposent et se neutralisent. A minima à l’heure actuelle, avant toute tractation. Les prochains jours permettront peut-être d’y voir plus clair en nous amenant soit vers une paralysie parlementaire soit vers des alliances aux airs de la IVème République. Sauf à un nouveau coup de Trafalgar en provenance de l’Elysée. La boucle serait ainsi bouclée … 
 



mardi 16 avril 2024

Sécurité sociale, j'écris ton nom

D’aucuns auront évidemment perçu le clin d’œil au poème « Liberté » de Paul Éluard, véritable ode à la liberté face à l’occupation allemande. Bien évidemment aucun parallèle sérieux ne peut être fait entre les deux époques tant les situations sont éloignées. Pour autant, l’idée sous-jacente à ce titre est d’attirer l’attention sur une nouvelle attaque contre notre modèle social. Mais plus encore que les traditionnelles économies à la petite semaine auxquelles nos chers gouvernements nous avaient habitués, il s’agit là d’un véritable coup de semonce à l’encontre de la sécurité sociale. Car l’annonce de Bruno Le Maire, qui a (été) rétropédalé depuis, consiste ni plus ni moins à remettre en cause son fonctionnement même basé sur l’universalité : de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. Autrement dit, les cotisations payées sont proportionnelles à la rémunération mais les remboursements sont les mêmes pour tous, ce qui permet de faire intervenir une certaine solidarité entre les plus aisés et les moins favorisés. Et c’est justement cette logique que le ministre a remis en question en suggérant de moduler les remboursements en fonction des revenus de l’assuré. Le tout dans une pure perspective comptable d’économies budgétaires.

Laissons de côté pour le moment, même s’il faudra y revenir, ces histoires d’austérité, de déficit, d’endettement et autres pactes européens. Et concentrons nous sur le fond de la proposition qui, si elle n’est plus d’actualité pour l’heure, constitue potentiellement un galop d’essai du gouvernement visant à prendre le pouls du peuple sur le sujet. L’idée consiste donc à réduire le montant des remboursements des frais médicaux pour les plus aisés. Si l’on va donc au bout du concept, cela signifie que ces personnes cotisent davantage que les autres (comme actuellement) mais qu’ils seraient moins remboursés (ce qui serait nouveau). Une véritable double peine donc pour toute une partie de la population qui se sentirait à juste titre lésée. Et ce d’autant plus que dans le même temps une autre partie de la population bénéficie de soins presque gratuitement (CMU, AME …).
Dans ces conditions, comment ne pas imaginer une large remise en question du système par ces contributeurs, voire même l’apparition de velléités de s’affranchir dudit système. Car quitte à payer cher, autant obtenir des remboursements à la hauteur en contrepartie. Ce qui signifierait inéluctablement la fin à plus ou moins court terme de notre système de solidarité.

Eurêka aurait dit Archimède en comprenant le principe de la poussée éponyme. Bruno Le Maire aurait-il agi de même en mûrissant ce projet d’essence libérale, cette idée de privatisation rampante de notre système de santé ? Ou s’est-il simplement laisser conter fleurette de la part de ses amis du monde des affaires (complémentaires santé, organismes de prévoyance …) ?
L’avenir nous le dira. A moins que la réponse ne soit déjà contenue dans son dernier livre …

samedi 9 mars 2024

IVG dans la constitution : dépassons la simple opération de communication

« La loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté garantie à la femme d'avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ». Tel est le texte publié au Journal Officiel et qui a été ajouté à l’article 34 de notre constitution suite au vote des députés et sénateurs réunis en congrès lundi 4 mars (780 pour, 72 contre).
Ce vote est ainsi l’aboutissement de nombreux mois de débats autour de l’opportunité de constitutionnaliser l’IVG, nés de la volonté du président Macron estimant que « les reculs de notre époque en ont fait une nécessité et une urgence ». Rappelons, à toute fin utile, que celui-ci faisait notamment référence à l’annulation par la Cour suprême des Etats-Unis en juin 2022 d’un arrêt fédéral, Roe vs Wade, qui garantissait depuis 1973 le droit d'avorter sur tout le territoire. Chaque Etat américain étant depuis libre de déterminer sa propre politique en matière d'accès à l’IVG.

D’aucuns ont alors estimé que cet évènement, combiné aux contestations dans certains pays d’Europe (Pologne, Hongrie), pouvait présenter un risque dans notre pays, et ce alors même que l'IVG est légalisée en France depuis la loi Veil de 1975. Pour autant, certains considèrent que son ajout dans la constitution compliquerait les possibilités de la remettre en cause. Plus encore, l’Elysée reconnait qu’il s’agit là davantage d’un symbole, d’un marqueur extrêmement fort qui s’inscrit dans « un combat qui a énormément de valeur aussi dans le débat international. »

Alors que penser de tout cela ? Existait-il un réel risque quant à une remise en question en France ? Personnellement je ne le crois pas. Aucun parti ou force politique majeur dans notre pays ne prône l’abolition de l’IVG. Preuve en est d’ailleurs que son instauration dans la constitution a été votée à une très large majorité. On pourra toutefois regretter que ceux qui s’opposaient à cette révision constitutionnelle soient caricaturés en affreux réactionnaires anti-IVG. Car finalement la question posée n’était pas d’être pour ou contre l’IVG mais de savoir si celle-ci devait être mentionnée en l’état dans la constitution. Et donc plus largement de s’interroger sur les contours de notre constitution qui consiste fondamentalement à organiser et régir le fonctionnement de nos institutions.

Pour ma part je reste sceptique sur l’utilité réelle de cette constitutionnalisation. D’une part, car je considère à l’instar de Gérard Larcher que « la Constitution n'est pas un catalogue de droits sociaux et sociétaux ». D’autre part car j’estime que ce vote ne garantit en rien l’immuabilité du droit à l’avortement dans la mesure où un nouveau vote pourra tout fait, certes plus difficilement qu’une simple loi, annuler cette décision en révisant à nouveau la constitution. Cela étant, et comme on dit chez moi, cela ne mange pas de pain donc mieux valait voter en faveur de cette mesure.

Et si finalement tout ceci n’était qu’une diversion, un subterfuge politique on ne peut plus classique qui consiste à user du sociétal pour détourner le regard tout à la fois des carences du gouvernement en matière sociale et des errements présidentiels à l’international ?
Pire encore, ne serait-ce pas là une mesure purement égotique du chef de l’Etat visant à laisser une trace dans l’Histoire faute de briller en d’autres domaines ?
Quoi qu’il en soit, si Emmanuel Macron voulait agir réellement en faveur de l’IVG il devrait alors tout mettre en œuvre pour rendre ce droit véritablement effectif afin que les femmes qui le souhaitent puissent y accéder dans de bonnes conditions de délais, d’infrastructures et d’accompagnement. 

 


 

samedi 2 mars 2024

Groupes de niveaux or not groupes de niveaux, that is the question

A quelques jours du retour à l’école pour un grand nombre d’élèves, quoi de mieux que de se pencher sur le sujet polémique de ces dernières semaines : l’instauration de groupes de niveaux en français et en maths pour les classes de 6ème et 5ème à la rentrée 2024.

Cette question soulève un vaste rejet de la part de la communauté éducative, entre autres pour des aspects de moyens humains et logistiques. Indéniablement cela va poser de véritables problèmes dans les collèges, y compris en termes d’emploi du temps. Mais ce ne sont pas ces aspects, aussi importants et légitimes soient-ils, qui m’intéressent. En réalité, c’est davantage la « mécanique intellectuelle, la philosophie » qu’il y a derrière la mesure annoncée en décembre par Gabriel Attal, alors ministre de l’Éducation nationale, qui m’a poussé à m’interroger.

 

Pour résumer en quelques mots l’argumentaire des opposants à ce dispositif, l’idée est de dire que celui-ci va imposer une ségrégation institutionnalisée des collégiens et va conduire à stigmatiser les élèves en difficultés en leur apposant une étiquette dès le début de l’année. Et tout cela en amplifiant les inégalités au lieu de les réduire ce qui était l’objectif initial. Preuve en serait qu’un certain nombre d’études iraient en ce sens.

Cela étant posé, sommes-nous bien plus avancés ? Pas totalement à vrai dire. Sauf à considérer que l’argument d’autorité des études sur le sujet met un point final au débat. Trop simpliste à mon sens et ce d’autant plus où d’autres études sont davantage mesurées dans leurs conclusions indiquant que ces groupes permettent notamment aux plus forts de progresser plus encore que s’ils étaient dans une classe multiniveaux.

 

Mais peut-être avons-nous mis là le doigt sur un aspect qui fâche. Des élèves déjà bons dans un domaine continueraient à progresser, creusant ainsi l’écart avec leurs camarades. Quelle hérésie pour les défenseurs d’un égalitarisme à toute épreuve ! Faudrait-il alors brider ces enfants là pour ne pas heurter ceux qui sont le plus en difficulté ? Belle opération de nivellement par le bas …

 

Mais laissons un peu de côté l’ironie pour poser quelques constats qui, s’ils peuvent déplaire, n’en sont pas moins une réalité. Même si l’on souhaiterait le contraire, les élèves ne sont pas tous égaux et ne disposent pas tous des mêmes capacités, que cela s’explique par leur situation familiale, culturelle, économique ou même pour des raisons propres à l’individu. Indéniablement, certains enfants sont favorisés par rapport à d’autres et verront leurs possibilités accrues du fait de ce contexte.

Partant de cet état de fait, le rôle de l’école ne doit-il pas être de chercher justement à réduire cette inégalité des chances ? Et donc d’œuvrer à donner les moyens à chacun d’acquérir les savoirs, savoir-faire et savoir-être qui lui permettront de s’accomplir ? Poser la question c’est finalement y répondre. Et si j’en suis convaincu je crois pourtant que, malheureusement, notre système éducatif peine à réaliser cet objectif.

 

Pointer du doigt l’ensemble des maux de l’Éducation Nationale serait bien trop long et serait d’ailleurs hors sujet par rapport au sujet qui nous occupe. Pour autant, profitons de l’occasion pour préciser que la question des moyens et par conséquence la problématique des effectifs est une difficulté majeure de notre système. Comment imaginer que nos enfants apprennent et progressent dans des classes surchargées à 30 élèves voire plus parfois. Impossible alors d’espérer un quelconque accompagnement individuel de qualité.

 

Mais alors est-ce que des groupes de niveaux serait la solution à tout ? Clairement non. Et si c’était le cas, cela aurait été mis en place depuis belle lurette. Malgré tout cela pourrait faciliter les choses par moment.

Si j’ai évidemment été élève il y a de cela quelques années (voire un peu plus), j’ai également eu la chance de donner des cours de comptabilité-gestion pendant une dizaine d’années à l’université et en école de commerce. L’idée n’est pas de tirer des vérités immuables de cette expérience dans l’enseignement supérieur car la population n’est pas la même qu’en école ou au collège. Pour autant, les problématiques rencontrées en termes d’animation de classe peuvent, pour certaines, converger.

En en particulier la notion d’effectifs intervient au premier chef d’où la nécessité absolue de plafonner les classes à 20-25 élèves voire moins si cela est possible. Et cela s’avère d’autant plus indispensable dans le cas de classes hétérogènes avec d’importantes disparités de niveaux. Sur ce dernier point d’ailleurs, je considère que pour un enseignant le fait d’avoir des élèves avec des écarts de niveaux significatifs constitue un obstacle supplémentaire au bon accomplissement de sa mission. De fait, cela conduit inévitablement à tenir un cap commun frustrant à la fois les meilleurs qui seront ralentis et les plus faibles qui se sentiront à la traine. Bref, un double effet kiss cool négatif.

A l’inverse, un regroupement des élèves de manière plus homogène permettrait d’avoir un rythme plus adapté aux besoins. Alors oui il est probable que certains groupes aillent plus vite et plus loin que d’autres. Oui certains groupes seront plus faibles que d’autres. Et alors ? N’est-ce pas d’ailleurs déjà le cas dans le système actuel avec une tête de classe et un peloton de queue que chaque professeur identifie aisément ? En quoi donc ces groupes de niveaux constitueraient une aberration s’ils permettaient que chacun puisse progresser à son rythme par un accompagnement renforcé ?

 

Rejeter par principe les groupes de niveaux ne fera pas reculer les écarts entre élèves. Et refuser de voir le problème ne le fera pas subitement disparaitre. C’est au contraire en prenant ce problème à bras le corps et en mettant en place des mesures ciblées sur ceux qui en ont le plus besoin telles que du soutien scolaire gratuit que l’on pourra corriger le tir.

dimanche 18 février 2024

Back to the chroniques ?

2 191. Voilà le nombre de jours qui nous sépare du dernier article sur ce blog. C’était le 18 février 2018 et je dissertais sur le thème de l'éducation. Depuis cette date, beaucoup de choses se sont passées, tant à l’échelle du monde et de notre pays bien sûr que de ma vie personnelle. En particulier, la temporalité de ce dernier article coïncide avec la montée en puissance de mon engagement local au sein de la commune de Pont de Claix. Celui-ci m’ayant conduit à délaisser ce blog au profit d’une alimentation plus prolifique de la page Facebook du collectif Pont de Claix Autrement que j’animais à l’époque. Chemin faisant, cet espace de réflexion en ligne s’est transposé IRL (In Real Life) jusqu’à initier une candidature, finalement avortée, pour les élections municipales 2020.

La naissance de ma fille cette même année puis l’épisode du Covid ont ensuite bouleversé notre mode de vie ainsi que notre quotidien, celui-ci l’étant d’autant plus du fait d’un déménagement sur la commune de Varces. Par la suite, et malgré des envies éphémères de reprendre la plume, des évolutions professionnelles suivies de plusieurs décès dans ma famille ont contribué à prolonger mon mutisme.
Pour autant, tous ces événements n’ont pas dissipé mon intérêt pour la vie politique et la chose publique. Ils m’ont toutefois permis de relativiser et de prendre du recul sur un certain nombre de choses. Gandhi disait « je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends ». Si cette citation peut paraître triviale de prime abord, je crois qu’elle sied bien aux dernières années de vie. Charge à nous, à moi de tenir le cap et de poursuivre les objectifs fixés.
Dans cette logique, après une mise en sommeil de 6 années, mon ambition est de redonner vie à ce projet de blog initié en mai 2008 alors que je débutais mes études dans l’enseignement supérieur. Tant d’heures passées, tant de plaisir pris à rédiger ces près de 500 textes à intervalles plus ou moins réguliers. Le challenge à relever n’en sera que plus grand et nous verrons d’ici quelques mois si la mission est accomplie.
Pour l’heure, et au moins l’espace de quelques instants, les chroniques de Tomgu sont de retour !