dimanche 2 octobre 2011

Le SMIC à 1700 €, une folie ? Vraiment ?

Ce matin, alors que je me promenais sur le marché de ma commune, un militant de la CGT m'a distribué un tract appelant à la mobilisation le 11 octobre prochain. Étant très friand de ce genre de documents politiques, je me suis logiquement empressé de le lire. Globalement, je dois reconnaître que je suis d'accord avec la quasi-totalité des revendications du syndicat. Toutefois, je ne sais pas si cela est une bonne chose ou non.
 
Mais ce qui m'a le plus interpellé dans ce tract est la proposition de porter le SMIC à 1700 € bruts par mois. Je remarque d'ailleurs que ce n'est pas la première fois que j'entends une telle chose puisque Jean-Luc Mélenchon est également partisan de cette mesure. Il va même plus loin dans la mesure où son souhait est d'aboutir à 1700 € nets en fin de législature.
 
A première vue, et certains de mes amis me l'ont fait observer, une telle augmentation de salaire serait impensable car cela handicaperait considérablement les entreprises qui perdraient alors en compétitivité. De plus, on m'a expliqué que certains métiers ne justifiaient pas une rémunération aussi "élevée".
 
Pour moi, ces arguments ne sont clairement pas valables. Le dernier me semble d'ailleurs particulièrement ignoble. En effet, comment peut-on dire qu'une personne ne mérite de gagner que 1000 € par mois ? Alors bien sûr certaines professions nécessitent des qualités moindres, c'est une évidence. Mais pourquoi retenir cet unique critère ? Ne pourrait-on pas nous intéresser à l'utilité du métier en question ? A sa pénibilité ? Dans ce cas, les femmes de ménage ou les éboueurs, par exemple, devraient être largement plus payés que les traders. Car reconnaissons que ceux-ci ont une utilité économique et sociale limitée, voire même inexistante.
En outre, qu'est ce qui, aujourd'hui, justifie que, dans une même société, dans une même nation, des individus gagnent plusieurs centaines de fois plus que d'autres ? Travaillent-ils davantage ? Sont-ils plus efficaces ? Sont-ils plus intelligents ? Non, non et encore non. Ou alors à la marge.
 
Mais réfléchissons maintenant au niveau actuel du SMIC. Celui-ci est à 1365 € bruts soit 1070 € nets. Comparons maintenant ce chiffre avec le seuil de pauvreté qui est fixé à 954 € (60 % du salaire médian). En somme, une personne travaillant et touchant le SMIC est à la limite du seuil de pauvreté. Cela est tout simplement aberrant.
Rappelons également qu'avec ces 1070 €, notre salarié doit payer son loyer, ses factures, se nourrir, se déplacer ... Bref, avec un revenu quasi constant, il doit faire face à des dépenses en perpétuelle augmentation. Ce n'est donc pas pour rien que les "smicards" ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts.
 
Une augmentation de salaire substantielle ne serait donc pas une hérésie. D'ailleurs, Patrick Artus, économiste français et directeur de la Recherche et des Études de Natixis, bien connu pour être un horrible gauchiste, avait appelé de ses voeux une augmentation généralisée des salaires.
Une réévaluation du SMIC ne serait donc pas forcément une mauvaise chose puisqu'elle permettrait d'améliorer le quotidien de nombreux Français.
 
Pour autant, tout n'est pas rose dans cette histoire et deux (fausses) limites sont avancées pour écarter cette mesure.
La première, qui revient à chaque augmentation du SMIC, est le fait que les salariés touchant un peu plus vont se retrouver au salaire minimum.
La seconde est que les charges de personnel sont un fardeau lourd à porter pour les entreprises et qu'une telle hausse viendrait les pénaliser dans leur compétitivité par rapport à leurs concurrents étrangers.
 
Comme je l'ai dit, je crois que ces restrictions sont, certes véridiques, mais aisément contournables et dépassables dès lors que l'on y réfléchit quelque peu. Comme chacun le sait, le niveau du SMIC est fixé annuellement par le gouvernement en tenant compte de l'inflation. Sa réévaluation ne concerne donc pas la totalité des salaires ce qui conduit logiquement à un tassement des rémunérations à la base. En outre, tout renchérissement du SMIC amène par la même occasion un accroissement des cotisations sociales.
 
Pour pallier toutes ces contraintes, des solutions simples (et non spécifiques à ces problématiques) peuvent être mises en oeuvre, tant au niveau micro que macro-économique :
- la mise en place d'une TVA sociale. Cela permettrait d'augmenter les salaires nets de tous et de diminuer les charges patronales des entreprises.
- la suppression des exonérations de charges sur les bas salaires et leur réorientation vers des salaires plus élevés. De fait, cette niche fiscale incite les entreprises à payer leurs salariés au SMIC puisqu'elles bénéficient d'allégements fiscaux.
- une taxation des revenus les plus importants. Le but est d'aboutir à une réduction des écarts de rémunération au sein des entreprises.
Ces mesures ne sont évidemment pas exhaustives et il en existe probablement beaucoup d'autres. Malgré tout, je crois qu'elles constituent un bon début.
 
Pour conclure, il apparaît donc que la politique salariale est plus qu'une problématique purement économique puisqu'elle revêt également des considérations sociales. Cela pose notamment la question du juste niveau de rémunération, de l'utilité sociale des individus ... En fait, je crois que les politiques salariales sont, en quelque sorte, le reflet de notre société dans la mesure où elles traduisent les inégalités, l'injustice sociale et fiscale ...
 
Certains estiment que le marché de l'emploi est un marché classique où se rencontrent l'offre et la demande avec un point d'équilibre. Ce n'est pas mon cas. Je ne crois en rien à la main invisible d'Adam Smith et à la supériorité des marchés quels qu'ils soient. C'est pourquoi il me semble impératif que l'Etat intervienne afin de jouer un rôle de régulation mais aussi de sanction quand cela est nécessaire.
 
Dans les années 1980, Ronald Reagan signa le retour des Etats-Unis sur le devant de la scène par son célèbre "America is back". Je souhaite que 2012 symbolise la renaissance d'un Etat fort et protecteur afin de remettre de l'ordre dans notre pays, trop longtemps laissé aux mains des puissances d'argent.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire